« Votre Pétra est historique, légendaire et métaphysique. Il est rare de pouvoir faire apparaître tant d’images avec les seuls mots. Vous avez pénétré le secret de cette région du monde, mieux que quiconque. »  J-M G. Le Clézio

Inutilement, j’essaierai de te décrire la Ville de Petra, des gigantesques falaises rouges et les vastes sanctuaires de la cité perdue. Je pourrais te dire qu’elle est l’une des plus grandes merveilles jamais érigées par l’Homme et la Nature ; mais je sais déjà que ce serait comme ne rien te dire.

A près de 200 km au sud de la capitale jordanienne Amman, entre le golfe d’Aqaba et la mer Morte, l’ancienne capitale du royaume des Nabatéens s’agite ; incrustée au fond d’une vallée sèche dans un plateau désertique et vaste.

Elle a la propriété de rester dans la mémoire par créer une image de ville qui sort de l’ordinaire dans les souvenirs. Une ville oubliée et redécouverte, cité des morts, de voyageurs curieux et aventuriers, cité nabatéenne, une ville vermeille, taillée et sculptée. Celui qui n’a vu qu’une fois cette ville ne peut jamais l’oublier.

 

Grand Temple.

Grand Temple.

 

Mon regard s’arrêtait pour découvrir les influences égyptiennes, assyriennes, grecques, romaines et byzantines. Ces populations ont imposé leur propre expérience de vie dans le désert.

Je te dirai l’admirable de la ville de Pétra : les minéraux qui composent cette formation géologique, ils revêtent les roches de spectaculaires tonalités rouges, ils sont susceptibles à être taillés et sculptés, grâce à sa faible dureté. Même si elle est située sur un terrain sec et des falaises rocheuses, la ville émerge de cela. Comme s’il s’agissait d’une sculpture, entre des roches abruptes, entre des passages creusés, sous l’effet de l’érosion de l’eau depuis des milliers d’années.

Émotions chromatiques

Émotions chromatiques

Elle n’est pas seulement ça, sinon qu’elle est le résultat des relations entre l’architecture, le paysage et les événements de son passé qui se combinent d’une manière intime et indissociable. Grand centre caravanier du commerce de l’encens d’Arabie, des soieries de Chine et des épices de l’Inde, un carrefour entre l’Arabie, l’Égypte et la Syrie-Phénicie. Petra est à moitié construite, à moitié sculptée dans la paroi rocheuse, entourée de montagnes criblées de défilés et de gorges. Un ingénieux système hydraulique a permis le vaste établissement humain d’une zone essentiellement aride durant les époques nabatéenne, romaine et byzantine. C’est l’un des plus riches et vastes sites archéologiques au monde dans un paysage dominant de grès rouge.

L’architecture de tombeaux et de temples ouvragés, les hauts lieux religieux, les canaux, tunnels et barrages de diversion restants qui se conjuguent avec un vaste réseau de citernes et de réservoirs qui contrôlaient et conservaient les eaux de pluie saisonnières, et quantité de vestiges archéologiques : mines de cuivre, temples, églises et autres édifices publics.

 

L'architecture émerge de la pierre.

L’architecture émerge de la pierre.

 

C’est pour cette raison, que pour décrire l’état de lieu de Petra, je devrais te parler de son passé. La cité ne dit rien de son passé, sinon qu’elle en contient comme lignes de la main.

La fusion des façades architecturales hellénistiques avec des temple/tombeaux nabatéens traditionnels taillés dans le rocher, comme le Khasneh, la Tombe à l’Urne, la Tombe Palais, le Tombeau Corinthien et El Deir (« monastère »), représente une réalisation artistique unique et un ensemble architectural remarquable depuis les premiers siècles av. J.-C. jusqu’à notre ère. La diversité des vestiges archéologiques et des monuments architecturaux depuis la préhistoire jusqu’à l’époque médiévale apporte un témoignage exceptionnel sur des civilisations aujourd’hui disparues, qui se sont succédées sur le site.

J’aimerais qu’une fois tu puisses voir cette extraordinaire fusion de l’architecture hellénistique avec la tradition orientale, qui marque une rencontre significative de l’Orient et de l’Occident au tournant du premier millénaire de notre ère. Je te dirais que l’unique instruction du manuel pour pouvoir comprendre la ville est que tu la laisses t’étonne. Tu dois écouter comme la pierre érodée qui autrefois a été taillée, a créé la ville

Cela dit, mon aventure commence là. Un long chemin m’attend. Je pouvais choisir d’aller à cheval, mais je préférais en profiter à pied, lentement. Un long chemin, mais intense, est une succession d’émotions chromatiques et spatiales qui sont enchaînées à chaque pas.

La façade du Deir

La façade du Deir

 

La ville commence à être définie avant d’y entrer, grâce à la tombe des Obélisques que, couronnée par quatre de ces piliers pyramidaux, introduisait l’architecture extravagante de Petra. Toutefois, l’érosion a fait du bon travail et plusieurs de ses lignes sculptées maintenant se résument à de légères ébauches.

Je m’enfonce dans le défilé, je ne saurais pas t’expliquer cette sensation, une voie d’accès si étroite et si propice pour stimuler les pouvoirs de l’imagination. Il pouvait s’écouter des rafales de tumulte et de silence, marchées, chevaux et les charrettes, qu’ils avancent mais ils ne sont pas vus, retombent avec son écho dans le défilé. Et quand ils passent ils soulèvent une poussière, et cette lumière rougeâtre paraît plus intense. Ce n’est pas une magie, mais elle paraît.

Toute la magie d’un voyage, tous nos rêves d’aventure, de sortir pour explorer, de se livrer au lieu, toutes ces sensations se multiplient dans cette entrée majestueuse aux ruines de Petra.

Érosion sur la pierre

Érosion sur la pierre

 

En partant de là-bas et en parcourant le défilé interminable du Siq qui a additionné une demi-heure plus à la longue attente. Ses murs escarpés, comme géants de pierre en gardant l’entrée, nous engloutissaient en nous permettant de révéler son secret. Et j’étais là, écrasée, petite et impatiente, en marchant près des bédouins, sur des ânes, qui m’invitaient à monter. J’ai décliné toutes les invitations disposées à atteindre à pied le Trésor, en dégustant chaque pas, en m’amusant de chaque regard. Je savoure ces dernières minutes qui me séparaient de mon but.

Brutalement, d’entre deux murs immenses qui semblaient vouloir avaler le défilé, elle apparaissait illuminée, la vision partielle et fragmentée du Trésor.

Et voilà, je l’ai vue : la Façade du Trésor, imposante, majestueuse, en décorant comme une petite promesse enveloppée de rose la couverture de ce livre de grand format et de couvertures durs auquel le hasard m’avait conduit sans motif et raison. Je suis resté là, capturée par elle.

Vue partielle du Trésor, depuis le défilé du Siq.

Vue partielle du Trésor, depuis le défilé du Siq.

Le Trésor a été construit comme édifice de bienvenue pour tous les visiteurs puisque comme un fragment de cultures antiques. De cette façon n’importe lequel qui s’enfonçait dans Petra trouverait dans elle une première image connue et familière. J’ai levé progressivement le regard en parcourant la grandeur de la façade, jusqu’à arriver à une petite urne où le vrai trésor était caché. Le passage du temps n’était pas l’unique coupable de la détérioration de la façade, puisque les traces des balles des bédouins étaient évidents, ils essayaient de voler le contenu précieux.

Je me rappelle que on ne pouvait pas entrer, mais ma curiosité pour découvrir cette architecture si singulière m’a permis de voir, de loin, des niches dans les murs et de finir avec la dispute de savoir si c’était un temple ou une tombe. Je ne cessais pas de me demander comment ils pouvaient avoir taillé avec tant de perfection l’édifice. Puisqu’à cette époque (Ve siècle av. J.-C.) il semblait déjà difficile de construire, donc la taille encore plus.
Aux pieds de cette façade, un nouveau niveau creusé sort partiellement ce qui m’a fait penser qu’il y a des siècles, le niveau était plus bas. J’ai continué d’observer ses détails, le travail précis qu’ils ont réalisé, bien que quelques reliefs fussent presque effacés.

 

Vue calmée du Trésor

Partie calmée du Trésor

La cité continue mais le Trésor est là, le trésor de la ville, et une autre étape de l’aventure pour commencer. Celle qui implique marcher par une ville perdue qui est ouverte dans une vallée. Les rangées serrées d’innombrables tombes creusées dans le rocher, les hauts lieux sacrificiels et autres lieux religieux. Un lieu qui a permis l’apogée d’une civilisation éblouissante, qui est tombé tout de suite dans l’abandon, et qui a attendu jusqu’à il y a 200 ans pour recommencer à connaître au monde.

Et c’est que Petra est si timide, si jalouse de son espace, si exquise dans sa cachette de pierre, que personne peut l’atteindre avec le regard à la première. Pétra doit être courtisée lentement, en gagnant peu à peu sa confiance et, avec elle, la vision de plus en plus complète de sa silhouette inégalable sculptée sur le passage du temps.

Un jour on pourra revenir. Je t’assure que cette ville ne s’efface pas de l’esprit. Elle est comme une armature ou une trame où chacun peut disposer les choses qu’il veut rappeler et comme ça, tu pourras créer tes propres souvenirs. On explorera, cherchera et découvrira pour que tu comprendras quand je te dis qu’il sert de peu essayer de décrire la cité indescriptible.

 

Ángela Gutiérrez García

Voyage en avril 2012

Bibliographie :

– Christian Augé et Jean-Marie Dentzer,Pétra, la cité des caravanes, Gallimard, 1999

– Emeric de Monteynard, Pétra, s’égarer vers le ciel, Vayrac, Tertium éditions, 2014

– Italo Calvino, Las ciudades invisibles, Siruela, 2011

– Henri Stierlin, Cités du désert – L’art antique au Proche-Orient : Pétra, Palmyre, Hatra Cartonné,  2000

– Mémoire sur les Nabatéens (Extrait du Nouveau Journal Asiatique).

Bibliographie webs :

http://www.nationalgeographic.com/

http://whc.unesco.org/

http://fr.visitjordan.com/