A l’instar d’un diamant, c’est une étincelante proposition que nous fait l’architecte Eric Kuhne avec le musée du Titanic Belfast. En effet, cette construction bardée de près de 3 000 plaques d’aluminium nous offre une incroyable lumière dans ce quartier industriel en pleine reconversion.

Photo de la façade principale du Titanic Belfast.

Situé sur les quais de la Lagan, à l’endroit même où a été jadis construit le mythique paquebot du Titanic entre 1909 et 1912 par les chantiers d’Harland & Wolff, le Titanic Belfast se veut aujourd’hui comme le fer de lance d’un grand projet de reconversion de ces quais avec l’objectif d’en faire le second centre d’attractivité de Belfast après l’hyper-centre historique situé autour de Donegall Square et de la cathédrale.

Plan de la ville de Belfast

Cette renaissance des rives de la Lagan, encore un peu désertes actuellement, marque également un tournant avec la période assombrie par les « Troubles ». Cette période de « Troubles » est marquée par de nombreux conflits opposant les Catholiques et les Protestants entre les années 1968 et 1998. Le climat étant aujourd’hui apaisé, le pays cherche à se constituer une nouvelle identité tournée davantage vers le tourisme et c’est dans cette dynamique que s’inscrit le Titanic Belfast. A l’instar de la ville de Bilbao, Belfast avait besoin de son propre Guggenheim.

Belfast, capitale de l’Irlande du Nord, Béal Feirste en gaélique signifiant l’embouchure sur le rivage sablonneux, s’est développée majoritairement à partir du XVIIème siècle grâce au commerce du lin, aux activités manufacturières et industrielles, le reste de l’Irlande du Nord étant davantage tourné vers l’activité agricole. Sa position stratégique le long des rivières de la Farset et de la Lagan, va également lui permettre d’étendre son activité portuaire mais également ses fameux chantiers navals Harland & Wolff d’où naquit le tristement célèbre Titanic en 1912.

Maquette présente au sein du musée mettant en parallèle le chantier du Titanic et le musée d’aujourd’hui.

C’est sur un site de près de 75 hectares, baptisé le « Quarter Titanic », qui a été délaissé progressivement suite au déclin de l’activité de construction navale, que le projet va prendre vie dès 2001. Situé sur les bords de la Lagan, les chantiers naval sont désormais réduits à une emprise beaucoup plus restreinte qu’auparavant et matérialisés par les deux grandes grues Sansom et Goliath, ce site vise accueillir un vaste complexe dédié au mythique navire composé de logements, de bureaux, de commerces mais également d’infrastructures touristiques et de loisir dans lequel s’insère le musée du Titanic Belfast.

C’est en 2005 que la décision de construire un musée entièrement dédié au Titanic, le Titanic Belfast, a été prise. L’opportunité de réceptionner le bâtiment pour le centenaire de l’inauguration du Titanic était inespérée pour faire la promotion de l’édifice mais cela impliquait de réaliser le bâtiment en moins de 7 ans. C’est l’architecte Eric Kuhne qui a été choisi pour relever ce défi. Le musée a bien ouvert ses portes le 31 mars 2012, le défi est relevé. Son architecture rend hommage aux constructions titanesques qui ont eu lieu le siècle dernier à cet endroit. Le bâtiment aura coûté la modique somme de 77 millions de £.

Quelques parallèles se sont glissés dans la construction de ce bâtiment flamboyant. En plus de la forme évocatrice de l’enveloppe du mastodonte des mers, la hauteur de ses façades de plus de 38 mètres reprennent fidèlement la hauteur de la coque du paquebot. La capacité des deux constructions est également équivalente, 3 547 passagers jadis et 3 547 visiteurs aujourd’hui.

De plus, l’emplacement n’a pas été choisi par hasard puisque le musée s’implante à l’extrémité de l’ancienne cale qui a, 100 ans plus tôt, vu naitre le Titanic. Même si aujourd’hui l’excavation de cette cale n’existe plus, son emplacement, symbolisé au sol et associé à un plan à l’échelle 1 du Titanic, définit un espace public autour duquel s’articule le bâtiment. Le choix des matériaux et notamment de l’aluminium anodisé rappelle également l’histoire du paquebot. En effet, le soleil se reflétant sur la surface du bâtiment peut faire penser aux flots des vagues mais également symboliser la froideur de la glace.

Vue du parvis qui matérialise l’emplacement de la cale du Titanic.

Le musée offre une surface d’exposition de 12 000 mètres carré organisé sur huit étages et découpée en une succession de galeries, chacune dédiée à un chapitre de l’histoire de paquebot allant de Belfast telle qu’elle était à l’époque où a été entrepris la construction du navire à la fameuse catastrophe dans la nuit du 14 au 15 avril 1912 en passant par la description du chantier naval, le lancement du Titanic, l’héritage qu’il a laissé et les mythes et légendes qu’il a inspirés.

Avec cet espace impressionnant, la ville tire définitivement un trait sur la relation douloureuse qui l’unit longtemps avec le Titanic. De même, avec la renaissance de ces quartiers délaissés et la volonté de développer le tourisme, la ville tire également un trait sur son passé marqué de nombreux conflits ayant endeuillés régulièrement le pays et notamment Belfast.

Même si la ville porte encore aujourd’hui les stigmates de ces conflits qui ont secoué le pays, ce projet comme quelques autres (notamment le complexe muséographique de la Chaussée des géants) est le témoin d’une société qui cherche définitivement à passer à autre chose. Le Titanic Belfast, reconnu comme l’une des plus importantes attractions touristiques du pays, est très bien accueilli par la population qui n’hésite pas à en faire la promotion. Les Belfastois le surnomment d’ailleurs affectueusement l’Iceberg notamment par sa ressemblance avec celui-ci, en hommage sans doute à ce compagnon d’infortune sans qui le Titanic aurait probablement rejoint la liste des paquebots ayant finit dans l’anonymat le plus total, comme ses deux jumeaux, le Britannic et l’Olympic.

Guillaume Bernard

Voyage effectué entre le 25/10/2015 et le 01/11/2015

Références :

LA JOIE. Clémentine, Un projet iconique au cœur du développement urbain de Belfast, École nationale supérieur d’architecture de Nantes, Nantes, 2015, 66 pages (Mémoire de master)

https://www.terresceltes.net/irlande/la-lagan-et-le-quartier-du-titanic (consulté le 12 juin 2017)

http://www.ireland.com/fr-fr/%C3%A9v%C3%A9nements/expositions/expositions-aux-mus%C3%A9es/destinations/northern-ireland/county-antrim/belfast/articles/histoire-du-titanic-%C3%A0-belfast/(consulté le 12 juin 2017)

Crédit photos et plan : Guillaume Bernard