Vinnytsia se trouve à environ 200 km au sud-ouest de Kiev, la capitale de l’Ukraine. C’est une des ville les plus importante du pays, elle compte plus de 370 000 résidents (officiellement, mais en réalité le nombre d’habitants est plus important en raison de l’afflux de réfugiés qui ont fuit la guerre et qui viennent de l’Est du pays). Certains estiment le nombre réel d’habitants à plus de 450 000. Je veux vous faire découvrir mon pays, qui malgré le contexte actuel difficile est digne d’intérêts.

Vinnytsia c’est ma ville natale, j’y ai vécue une grande partie de ma vie. Ma famille y habite toujours, et je garde en mémoire beaucoup de souvenirs et d’anecdotes sur ce lieu. J’adore cette ville et nous allons découvrir son centre historique. Cette balade à Vinnytsia nous permettra de remonter le cours de l’Histoire mouvementée de l’Ukraine. Débutons donc par un bref historique de la ville.

Un peu d’histoire

La première mention de la ville date du XIVe siècle. La ville devient au fil des siècles un carrefour commercial, avec une forte tradition de marchés en plein air ou couverts. Subissant de nombreuses invasions durant les siècles suivants, Vinnytsia va réellement prendre son envol durant le XIXe siècle et le début du XXe siècle.

Un homme a principalement façonné la Vinnytsia actuelle, telle que nous la connaissons. Il s’agit de l’architecte Gregory Artynov (1860-1919). Aujourd’hui nous pouvons encore admirer une trentaine de bâtiments conçus par ses soins. En voici une liste non exhaustive : l’École n°2 « l’école pour les filles » (érigée en 1900), le Théâtre Sadowski , la Chambre de commerce (1911), ou encore le bâtiment avec en façade le célèbre commerce « Plantes médicinales » (maison Raikher). Durant cette période faste, la cité se développa et le tramway fit son apparition en 1913. La première ligne longeait la rue Soborna principale artère du centre-ville.

Suite à cette période prospère, la ville subit de nombreux dommages, notamment lors de la répression soviétique envers les civils ukrainiens (en 1937-38 où 10 000 hommes furent exécutés). Mais les dégâts les plus dévastateurs ont été causés par les nazis lors de la seconde guerre mondiale. Vinnytsia et sa région était importante stratégiquement pour les occupants. Les nazis ont construit à proximité de la ville un poste de commandement encore visible aujourd’hui : le siège d’Hitler le « Werwolf, le loup-garou ». Leur présence importante engendra de nombreuses exactions. Les combats furent acharnés et les civils en subirent les conséquences. Vinnytsia a ainsi perdu deux tiers de sa population, le nombre d’habitants chutant dramatiquement passant de 100 000 à moins de 27 000. Près de 2 000 maisons et une quarantaine d’entreprises furent complètement détruites. Au début des années 1950 l’industrie de la ville fut presque entièrement reconstruite. Une grande partie de la ville a donc été bâtie à partir de 1950, dans le plus pur style soviétique. Une partie du centre-ville fut néanmoins partiellement sauvegardée et garde des traces d’un passé plus lointain. Je vous invite à me suivre pour découvrir les secrets de Vinnytsia.

Habitant de l’autre côté de la ville (à l’extrémité opposée de la gare) je dois prendre le tramway pour me rendre au centre-ville. Je m’arrête toujours à l’arrêt Univermag, qui est un centre commercial. Deux options s’offrent alors à moi : continuer mon chemin le long de la rue Soborna ou traverser le parc central et arriver près de la Tour. Avant de poursuivre notre chemin vers le parc central, regardons de plus près ce centre-commercial.

Univermag

Univermag

En Septembre 1964, sur le site de l’ancien marché a été construit ce centre commercial. Il est devenu incontournable, une référence, un symbole de la ville. Ce centre commercial en libre-service fut l’un des premiers de ce type en Union Soviétique. Les gens venaient de loin pour y effectuer des achats et bénéficier de ce luxe. De Moscou mais aussi d’autres républiques soviétiques… Il faut se replonger dans le contexte. A cette époque ce type de centre commercial était tout bonnement extraordinaire en URSS. En 1970, l’équipe d’Univermag fut décorée et récompensée par le très officiel « Ordre du Drapeau Rouge du Travail ». Cet Ordre était accroché sur le toit du bâtiment à côté de son nom jusqu’à peu. En 2017, à la demande d’une nouvelle loi votée en 2015 par le parlement ukrainien sur les symboles associés à l’Union soviétique cet insigne fut décroché.

« Ordre du Drapeau Rouge du Travail » , source : http://urban.vn.ua/archives/4104

Pour comprendre il convient de se plonger dans les soubresauts de l’Histoire et notamment l’Euromaïdan en 2014. Suite au soulèvement populaire pro-européen débuté sur la place centrale de Kiev fin 2013 et la destitution de l’ex-président ukrainien Ianoukovitch pro-russe, une loi dite de « décommunisation » fut votée par le nouveau gouvernement.

Monument dédié aux morts de l’Euromaïdan, 2014

En 2015, cette loi mémorielle décréta la suppression des symboles soviétiques. Pourquoi me direz-vous ? Car les symboles soviétiques représentent pour beaucoup d’Ukrainiens le passé soviétique, avec tout ce qu’il a de douloureux : des restrictions linguistiques au goulag, en passant par les persécutions politiques. Il y a cette idée qu’en faisant disparaître les symboles soviétiques, le pays s’affranchira de ce passé, ses infrastructures se moderniseront, la bureaucratie héritée du système communiste disparaîtra. En résumé, que l’Ukraine se rapprochera de l’Europe et s’affranchira de l’omnipotent voisin russe.

Cependant il est à noter que cette « décommunisation » ne fait pas consensus dans la société. Pour beaucoup d’autres Ukrainiens, le passé soviétique évoque des bons souvenirs. L’époque de leur jeunesse, le temps du plein emploi, le temps où les institutions d’État fonctionnaient, où la médecine était gratuite. Certains ne comprennent pas ces suppressions et les vivent même comme une insulte. Je m’arrêterai là sur le contexte politique mais il me semblait important de l’évoquer pour comprendre l’Ukraine actuelle et son évolution.

En 2017 le marteau et la faucille des colonnes qui ornaient l’entrée du pont central de Vinnytsia furent enlevés. Une vingtaine d’autres symboles soviétiques doivent à terme être détruit à Vinnytsia (statues, mosaïques…). Ce processus est national, des milliers d’œuvres ont, ou vont être détruites dans tout le pays (notamment les statues de Lénine).

Le marteau et la faucille du pont central, source : http://urban.vn.ua/archives/4104

Je peux comprendre cette envie de s’affranchir du passé soviétique, avec le contexte actuel et la guerre à l’Est du pays où la Russie joue un jeu trouble. Mais nier le passé soviétique, en faisant disparaître des symboles, des statues, c’est tout simplement impossible. Gommer les symboles soviétiques ne nous affranchira pas de notre passé. Il faut se rappeler que l’URSS, pour l’Ukraine, cela a duré 70 ans. C’est au moins trois générations, marquées par les politiques soviétiques qui ont fait naître des villes, construit des barrages, des usines, des aéroports. Une simple promenade dans les rues de Vinnytsia suffit à comprendre que ce n’est pas une ville d’Europe de l’ouest. C’est une ville pensée comme soviétique. Et ces symboles font partie de notre patrimoine architectural.

Après cet intermède reprenons notre promenade qui nous mènera dans le parc central.

Le parc central, source : http://www.vmr.gov.ua

Le parc central

Ce parc de 40 hectares a été conçu en 1936. Son entrée est marquée par un arc en béton avec une pointe métallique qui symbolise l’espace. L’arc de Vinnytsia est devenu l’un des symboles de la ville que l’on doit à l’architecte Roman Marhel.
Ce lieu agréable où les habitants viennent se ressourcer a une histoire tragique. Durant les années 1937-38 dans la région de Vinnytsia, les soviétiques pour asseoir leur pouvoir et réprimer les aspirations nationalistes ukrainiennes, ont exécutés des milliers de civils, principalement dans la cour du bâtiment du NKVD situé prés du parc (plus de 30 000 personnes ont ainsi disparu).

Le NKVD (ou commissariat du peuple aux affaires intérieures) était l’organisme d’État soviétique chargé de maintenir l’ordre public. Des milliers de cadavres ont été enterrés directement dans le parc, dans des fosses communes. Le nombre total de corps exhumés dans le parc au cours des enquêtes menées par les nazis fut de 10 000 environ.
Durant la seconde guerre mondiale le parc a subi de nombreux dommages. En 1945 après la libération de la ville par les soviétiques, le lieu fut restauré. L’URSS attribua les massacres précédemment évoqués aux allemands, et détruisit toutes traces des charniers. Des activités de loisirs furent progressivement érigées. Durant les années 1990, le parc est devenu une zone de loisirs avec le développement de nombreuses activités. Des restaurants, une salle de concert, le théâtre d’été, le stade, une patinoire, le planétarium, de nombreux manèges et machines à sous, ont ainsi vu le jour.

Malgré les tragédies passées, ce parc est de nos jours un lieu de fêtes où se rejoignent les habitants pour célébrer les événements locaux, les jours fériés. Le parc est ouvert jour et nuit. J’aime y flâner lors des douces soirées estivales.

En terminant la traversée du parc pour nous rendre au centre , nous passons à côté du théâtre Sadowski (projet d’Artynov). Au début du XXe siècle, la ville connaît un grand essor. Les notables de Vinnytsia souhaitent se divertir et imiter les distractions des villes européennes. La bourgeoisie locale décide alors de financer la construction de ce théâtre pour son propre divertissement.

Le théâtre Sadowski

Le château d’eau

Le château d’eau ou la tour de Vinnytsia

En sortant du parc, nous arrivons au centre de Vinnytsia. Près de la mairie, se trouve la tour de 28 mètres, point de repère pour les habitants. Cet endroit est un marqueur spatio-temporel où l’on se donne rendez-vous.

Au début du XXe siècle le manque d’eau potable est un véritable souci de santé publique. La population buvait de l’eau non-potable provenant du Boug, le fleuve qui traverse la ville. Seuls les plus riches pouvaient utiliser de l’eau potable provenant de puits. En 1912, grâce au projet de Gregory Artynov le château d’eau du centre-ville fut construit.

Durant la seconde Guerre Mondiale la tour servit de poste d’observation, étant l’un des plus hauts bâtiments de la ville. Après la guerre, la tour a perdu son utilité initiale de gestion de l’eau et a été transformée en un musée. En 1985 s’ouvre ainsi le Musée de la mémoire, pour commémorer les soldats morts en Afghanistan durant les années 1979-1989.

Près de la tour se trouve le « mémorial du feu éternel » en hommage aux morts de la Seconde Guerre mondiale. Un cinéma, de nombreux restaurants et un centre commercial se situent également à proximité de la tour. La suite de la promenade nous emmène sur la rue Soborna.

La rue Soborna, source : http://inspired.com.ua

La rue Soborna

Le centre historique de Vinnytsia est traversé par la rue Soborna. Cette artère commerçante est toujours animée et très fréquentée. Les cloches des tramway résonnent et rythment vos pas. Des cafés jalonnent la rue, il est agréable d’y déambuler, d’y prendre son temps. Les habitants et les touristes viennent souvent s’y promener, notamment à la nuit tombée lorsque les lampadaires s’illuminent.

La rue se situe sur la rive droite du Boug méridional (le fleuve qui traverse la cité). Sa longueur totale est marquante. Elle s’échelonne sur plus de 1 600 mètres soit 400 mètres de plus que la principale artère commerçante de Kiev la rue Khreshchatyk qui ne mesure « que » 1 200 mètres. La rue Soborna s’appelait à l’origine la rue Bolshaya que l’on pourrait traduire par « la grande ». Depuis la rue a souvent changé de nom, au gré des événements qui ont marqué l’histoire contemporaine de la ville. « Avenue ukrainienne » sous l’occupation nazie de 1941-1944, elle est devenue la rue « de Lénine » durant la période soviétique pour enfin devenir la rue Soborna (littéralement la rue de la Cathédrale) après la chute de l’URSS et l’indépendance du pays en 1991.

Ecole n°2

Le premier bâtiment pouvant éveiller notre intérêt est l’école n°2, la plus ancienne de la cité. Au début du XXe siècle, les familles les plus aisées envoyaient leurs enfants faire leurs études à Kiev, Odessa où Saint-Pétersbourg. L’école des filles n°2 fut alors construite pour remédier à cette situation. Ce fut le premier bâtiment de la ville conçu par l’architecte Artynov.

L’Institut de commerce et d’économie

Nous continuons de déambuler sur la rue Soborna. Les restaurants, les commerces se succèdent. Nous passons ensuite à côté de l’Institut de commerce et d’économie (1889), puis le bâtiment avec en façade le célèbre commerce « Plantes médicinales » (maison Raikher) et la Chambre de commerce (où se déroule de nombreuses expositions). Nous arrivons enfin sur la place centrale de la ville, avec le conseil municipal au style très soviétique.
De l’autre côté de la rue, l’Hôtel Savoy  attire notre regard.

L’Hôtel Savoy

L’Hôtel Savoy est un monument architectural important localement, l’un des symboles de la ville. Sa construction a débuté en 1912. Le Savoy est de style moderne avec des éléments empruntant au baroque. Ce fut le premier bâtiment de six étages érigé à Vinnytsia. Un lieu à la pointe de l’innovation avec eau chaude, ascenseur électrique, système d’alimentation et d’évacuation de l’eau, ou encore éclairage électrique. Du jamais vu à Vinnytsia !

La rue  Soborna

L’Église Sainte-Marie

L’Église Sainte-Marie et les catacombes

A quelques pas du Savoy, un bâtiment attire notre attention avec son architecture ascétique. C’est l’Église Sainte-Marie – l’un des plus anciens bâtiments de Vinnytsia. Elle a été construite au XVIIIe siècle dans le style baroque toscan. En 1932 le gouvernement soviétique (où la religion était interdite) a officiellement remis le temple au club d’aviation local. Il a également détruit les murs qui entouraient le bâtiment. A la place de l’autel dans l’église se trouvaient des portraits de dirigeants, Marx, Lénine, et des maquettes d’avions étaient accrochées au plafond. Imaginez un peu ! En 1941, lorsque les Allemands ont pris possession de la ville, l’église retrouva sa fonction religieuse, mais cela ne dura pas. Avec le retour des soviétiques, après 1944, l’église s’est à nouveau transformée cette fois-ci en salle de sport. Le bâtiment a évolué de telle manière que plus rien ne ressemblait à une église. En 1989, après la chute de l’URSS, les catholiques ont milité et ont finalement repris possession du lieu. Durant les années 1990 Sainte-Marie a été reconstruite à l’identique, sur le modèle du XVIIIe siècle. Mais ce lieu renferme bien des secrets et notamment les catacombes.

Il y a beaucoup de légendes sur la partie souterraine de la ville. Les catacombes, qui font partie de l’ancienne Vinnytsia souterraine, sont situés à une profondeur de 14 mètres. Les historiens affirment qu’auparavant il était possible de se rendre d’un bout à l’autre de la ville grâce au réseau souterrain. Aujourd’hui les différents catacombes ne forment plus un réseau mais sont disséminés dans la ville. Des souterrains sont encore à découvrir.

Ces passages étaient utilisés pour échapper à l’ennemi, car Vinnytsia a subi de nombreuses invasions durant son histoire. Ils datent sans doute du XVe siècle. Depuis 2016, des visites guidées sont organisées dans les tunnels sous l’église Sainte-Marie. Cette église n’était donc pas simplement un complexe spirituel, c’était un lieu de refuge pour la population, en cas d’invasion. Les catacombes de Vinnytsia sont des tunnels avec un gabarit moyen de 5 mètres de largeur sur 2,5 mètres de hauteur. Il était même possible d’y circuler en calèche ou en carrosse.

La Cathédrale orthodoxe

La Cathédrale orthodoxe

A proximité de l’église se trouve le Musée national d’Histoire et la Cathédrale Orthodoxe, le principal lieu de culte à Vinnytsia. Une grande majorité de la population de la ville se déclare en effet orthodoxe (environ 90%). Cette cathédrale en briques de style baroque a été érigée en 1779 à la place d’une église dominicaine en bois. Durant les années 1960 une salle de sport du club « Dynamo » y avait pris place. Aujourd’hui, pour les grandes fêtes religieuses comme Pâques, la moitié de la ville s’y retrouve et une grande queue s’étend le long du trottoir devant l’entrée de l’édifice. Le soir, la Cathédrale s’illumine, et devient encore plus majestueuse. Je ne suis pas très pieuse mais j’aime parfois y pénétrer pour écouter les chants des « babouchkas », les grands-mères qui prient pour un avenir meilleur et la fin de la guerre. Continuons notre ballade en empruntant le pont traversant le Boug, et approchons nous des berges du fleuve et de la fontaine Roshen.

La fontaine Roshen, source : https://vk.com/typical_vinnitsya

La fontaine Roshen

Le soir venu, beaucoup se dirigent vers la fontaine Roshen construite en 2011 sur le Boug. C’est la plus grande fontaine flottante de son et lumière d’Ukraine et d’Europe. Elle porte le nom de l’entreprise de confiseries d’un homme d’affaires originaire de Vinnytsia : Petro Poroshenko (qui est également président du pays). En Ukraine pouvoir économique et politique sont intiment liés.

L’usine Roshen, source : https://vk.com/typical_vinnitsya

La projection du laser-show commence à la tombée de la nuit. Le quai est alors bondé. Lors de l’inauguration de la fontaine le pont était fermé à la circulation. Il y avait tellement de monde que la ville a craint que le pont ne s’effondre sous le poids des gens !

L’ambiance de Vinnytsia est très différente des autres villes d’Ukraine. Ici nous aimons faire la fête et se rejoindre dans les bars. Il y a beaucoup de jeunes et de familles qui se promènent. Vinnytsia n’est pas une ville très connue mais elle mérite le détour. La vie y est paisible, les habitants accueillant. La ville a su garder une identité « ukrainienne » qui se mêle aux influences héritées de l’URSS. Il suffit d’écouter les habitants parler un mélange des deux langues (russe et ukrainien), que l’on nomme le « sourjik » pour comprendre cette double identité. J’espère vous retrouver très vite en Ukraine et pourquoi pas à Vinnytsia.

Olena Gorol

Photographies de l’auteur.

Bibliographie :

  1. http://vn.depo.ua/ukr/vn/taemnitsi-vinnitskih-katakomb-rozkrito-16102016160000
  2. http://urban.vn.ua/archives/4104
  3. http://www.myvin.com.ua/ua/news/stuff/17817.html
  4. http://www.vinnitsa.info/news/yak-istoriya-zminila-tsentr-vinnitsi-vid-velikoyi-do-sobornoyi-cherez-lenina-fotofakt.html