C’est en sortant d’une des plus grandes avenues de Bangkok en Thaïlande que je me retrouve dans une rue calme menant à un bras du Klong. Une rue où se mélangent de nouveaux buildings aux tailles disproportionnées par rapport aux habitations faites de bric et de broc, là où se melangent touristes, habitants et street food… C’est en s’enfonçant dans cette impasse, que l’on aperçoit un fond de feuillage dense visible au loin. A proximité, les caractéristiques distinctives d’une maison traditionnelle thaïlandaise apparaissent au milieu de ce quartier.

Vue de la cour de la Jim Thompson House


JIM THOMSPON, LE PERSONNAGE

Nous nous trouvons dans la maison thaïlandaise de Jim Thompson, un américain né en 1906 à Greenville dans l’Etat du Delaware, sur la côte Est des Etats-Unis. Au début de la Seconde guerre mondiale, il quitte sa vie d’architecte à New York, pour s’engager dans l’armée Américaine.

Il entre dans les services de renseignements militaires (l’OSS) et participe à la campagne d’Europe avant d’être envoyé en Thaïlande en 1945. La guerre prend fin avant le début de sa mission c’est alors qu’il rentre dans la légation Américaine à Bangkok. Un an plus tard, il quitte l’armée et décide de s’installer définitivement en Thaïlande. Jim Thompson se passionne pour la soie Thaï tissée à la main et se consacre au renouvellement de cet artisanat tombé dans l’oubli. Dessinateur et audacieux de talent, sa participation fut fondamentale au renouveau du tissage de la soie Thaïlandaise et à la réputation internationale qu’elle exerce.

Entrée de la Jim Thompson House

 

Amoureux de l’art asiatique, il racheta six maisons thaïes traditionnelles, la plupart à Ayutthaya. Elles furent transportées et remontées ensemble à Bangkok. Il s’agit d’un des rares exemples d’architecture thaïe traditionnelle conservés en excellent état. Cette maison servit à Jim Thompson à entreposer ses collections de meubles et de céramiques Bencharong.

Le 26 mars 1967, Jim Thompson, part en weekend chez des amis en Malaisie, il disparaît mystérieusement à Cameron Highlands, jamais le moindre indice n’a permis de découvrir ce qui lui est arrivé. Sa maison légendaire témoigne de son goût exceptionnel et de son engagement pour l’art Thaïlandais, et selon sa volonté, devint un musée. Située dans un parc luxuriant, elle est aujourd’hui l’une des attractions touristiques de Bangkok la plus attrayante.

L’ARCHITECTURE THAÏLANDAISE

Jim Thompson deviendra surtout célèbre avec la construction de sa résidence. Fidèle à son goût de l’authentique, Jim Thomspon a suivi avec le plus grand respect les traditions des artisans bâtisseurs thaïlandais. Ce type d’habitation classique de la maison traditionnelle la plus connue combine avec grâce d’une excellente adaptation au climat et d’une manière de vivre.

Dessin de Jim Thompson et de ses architectes thaïlandais

image © designboom

 

Malgrè l’influence d’autres grandes cultures du monde (Indienne, Chinoise, Khmer, Birmane..) incorporée dans les éléments décoratifs, le style architectural des maisons thaïlandaises reste relativement simple. Le bois est le matériau le plus couramment utilisé dans la construction de ces maisons car le bois en teck dur et durable des forêts était le plus répandu.

Cette maison typique du centre de la Thaïlande se caractérise par une certaine élégance. L’architecture religieuse et domestique partage certaines caractéristiques communes. Comme les temples, ces maisons ont un toit de forme galbée, concave avec le bord du pignon qui se termine en forme de serpent qui ornent les temples Khmers vers le ciel pour créer une illusion de hauteur. La courbe du toit escarpée est mise en évidence par un bord courbé appelé Panlom, placé au bord du pignon pour protéger les tuiles du vent. Les tuiles de la toiture reprennent le dessin traditionnel.

Rez de chaussée – Endroit de fraicheur

 

L’adaptation de ces habitations aux fortes pluies et à la chaleur débute avec une construction sur pilotis et de murs construits légèrement inclinés vers le centre pour augmenter la solidité. Ceci est impératif car les villages du centre thaïlandais sont principalement bâtis à proximité des rivières et canaux et donc soumis aux inondations pendant la saison des pluies. La surélévation offre également une protection à la faune hostile.

La sous-face d’une hauteur de 2m à 2m50 de la maison est un espace polyvalent utilisé par les habitants comme salon pendant la saison chaude comme stockage ou comme lieu pour les travaux artisanaux…

Escalier menant à la chambre principale

L’architecture thaïe traditionnelle assure un contrôle climatique naturel à l’intérieur de la maison, un flux d’air de rafraichissement naturel est créé sous le toit et le plancher. De plus, un grand nombre de fenêtres et de portes sont soigneusement alignées pour faciliter un flux interrompu pour favoriser la circulation de l’air.

Dans la tradition thaïlandaise, les esprits et les croyances sont très présents ainsi que la superstition, c’est pourquoi les seuils des maisons sont surélevés pour empêcher les mauvais esprits rampants de pénétrer dans les habitations et éviter de perturber leur sommeil. Ce seuil était aussi fonctionnel, il agit comme une aide structurelle qui maintient les sections des parois.

Jim Thompson, The Thai Silk Sketchbook par graham byfield,  image © designboom

Cette maison nous amène donc dans un autre monde, une autre époque, en plein  cœur de Bangkok,  où l’on peut apprécier tout l’investissement de Jim Thompson qui a rebâti cet ensemble de maisons dans le respect de la culture Thaïlandaise.

Francois Jacquelin

Voyage du 05 au 23 février 2017

Bibliographie :

Jim Thompson, La maison sur le Klong, William Warren, Pacifique, 2004, 112p.

Jim Thompson, L’américain légendaire de Thaïlande, William Warren, Pacifique,  2003, 214p.

Jim Thompson, The Unsolved Mystery, Williman Warren, Editions Didier Millet Pty Ltd, 1999, 248p.