UNE EXPOSITION-VENTE À L’ENTRÉE DU CAMPUS VITRA

Les fabricants suisses de mobilier design Vitra possèdent leur siège social à Birsfelden, près de Bâle mais leur site de production reste situé à son emplacement d’origine, au Weil-am-Rhein, en Allemagne. Fondée en 1950 par Willi Fehlbaum, l’entreprise se développe grâce à la reconstruction du site, suite à un incendie en 1981. De nouveaux sites s’ouvrent d’ailleurs en Allemagne, en Chine et aux États-Unis. L’entreprise compte également de nombreuses filiales en Autriche, Belgique, Chine, République Tchèque, France, Allemagne, Inde, Japon, Mexique, Pays-Bas, Norvège, Espagne, Suède, Suisse, Angleterre et aux États-Unis.

L’entreprise produit les meubles de designers célèbres (XXe) : Verner Panton, Jean Prouvé Charles & Ray Eames. Elle fabrique et présente également des meubles de designers plus contemporains : Philippe Starck, Hella Jongerius, Jasper Morrison.

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L’entreprise devint florissante, le campus du Weil-am-Rhein fut d’ailleurs bâti petit à petit par de célèbres architectes :

1. 1981 – Atelier de fabrication par Nicholas Grimshaw
2. 1989 – Vitra Design Museum par Frank Gehry
3. 1993 – Pavillon de conférences par Tadao Ando
4 . 1993 – Caserne des pompiers par Zaha Hadid
5. 1994 – Atelier de fabrication par Alvaro Siza
6. 2010 – Expo-vente VitraHaus par Herzog & de Meuron

La Vitrahaus est donc un showroom, permettant d’observer l’étendue de la production, d’apprécier le réel impact d’un meuble dans un ou plusieurs types d’aménagements intérieurs ou de tester le niveau de confort.

VU DE L’EXTÉRIEUR, CE BÂTIMENT EST UN EMPILEMENT DE VOLUMES SIMPLES

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En reprenant le motif de la «maison» et du toit à double pente, Herzog & de Meuron font appel à un motif simple qu’ils empilent pour créer une géométrie plus complexe mais toujours très lisible.

Pour ce faire, rien n’a été laissé au hasard. Voici plusieurs dispositifs qui semble-t-il, ont permis de donner cet effet à l’édifice :

  •  la monochromie (presque) totale des façades extérieures
  •  le contraste de couleur intérieur/extérieur
  • les grandes ouvertures aux menuiseries discrètes
  • la disparition des éléments techniques en toiture (pas de gouttières par exemple)

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Seule la «maison» abritant le Lounge Chair Atelier se démarque au niveau de la forme et des matériaux (façade bardée en bois). Le reste est d’un gris foncé uniforme, les pans de toitures noirs possèdent tous deux chéneaux en rive.

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Les murs extérieurs foncés se prolongent à l’intérieur pour devenir des murs clairs, blancs. Cette prolongation est visible au niveau des ouvertures, comme sur cette photo, où le détail de liaison a été particulièrement travaillé.

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Les grandes ouvertures, de formes similaires (mais non identiques), occupent l’ensemble de l’extrémité de chaque volume extrudé. Les montants métalliques de menuiseries sont réduits aux minimum afin de laisser à ces parois leur transparence quasi-parfaite.

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S’il n’y a pas de descentes pluviales apparentes, c’est parce qu’elles sont intégrées dans les murs. Cependant, avec tous les passages en sous-face, les préaux et les porte-à-faux, comment acheminer l’eau jusque’au sol ? Herzog et de Meuron ont décidé de laisser l’eau s’écouler directement de la sous-face à un bac de drainage sous gravier installé en dessous.

VISITE DU BÂTIMENT : UNE ORGANISATION PYRAMIDALE

Au rez-de-chaussée de ce bâtiment, on trouve une cour centrale, en partie à ciel ouvert. Pour y accéder il faut passer sous l’un des volumes surélevés, elle donne accès à trois espaces : le Lounge Chair Atelier qu’on a déjà évoqué, un espace de réception et le hall d’entrée à proprement parler. Ce «hall» abrite l’accueil, la boutique et une cafétéria.

Il existe trois moyens de se déplacer verticalement dans le showroom : l’ascenseur, le parcours au travers de tous les espaces d’expositions ou un escalier direct qui permet d’aller de haut en bas tout en desservant tous les niveaux. Ces éléments de circulation sont les seuls éléments «courbes», ils viennent nuancer la rigidité géométrique du reste du projet.

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La forme arrondie de l’escalier présent au rez-de-chaussée pourra être retrouvée tout au long de la visite.

C’est sûrement en visitant le bâtiment de haut en bas que l’organisation intérieure est la plus lisible. En effet, le volume le plus près du ciel est le plus «minimal» : tout en longueur et vraiment traversant, les deux ouvertures aux extrémités se font directement face. L’une d’elle accueille d’ailleurs l’unique loggia du projet.

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Photographie par Honorine van den Broek

Le volume le plus haut de la Vitrahaus, on regarde vers la loggia. On voit que l’espace est libre, très lisible.

Plus on descend dans la Vitrahaus plus l’ensemble se complexifie, les murs extérieurs noirs deviennent blancs et se prolongent à l’intérieur, délimitant des espaces plus à l’échelle de (grandes) pièces de vie. Si l’imbrication permet de réduire les grandes percées horizontales, elle laisse aussi la possibilité d’ouvrir l’espace verticalement. En effet, de nombreux espaces proposent un double hauteur et un ingénieux système de mezzanine.

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A l’intersection de deux «maisons», on voit que le mur devient blanc et que l’imbrication a permis la mise en place d’une double hauteur permettant depuis l’étage de profiter des deux angles d’ouvertures.

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En regardant le même espace dans l’autre sens, on s’aperçoit que l’étage supérieur est une mezzanine, desservie par un escalier arrondi.

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Ces espaces de double hauteur permettent une circulation de la lumière et des vues. Les différentes salles d’expositions deviennent observables depuis des points de vue inattendus, obligeant à travailler la scénographie de manière totale.

REGARD SUR LES MENUISERIES DE LA VITRAHAUS

Les menuiseries constituent un des éléments fondamentaux du projet. Une attention particulière semble avoir été portée au traitement des ouvertures. Elles ont été travaillées de manière à être les moins présentes visuellement, à l’intérieur comme à l’extérieur. En effet, les montagnes alentours et le campus en lui-même offrent des vues à privilégier depuis les espaces d’expositions. (voir photos ci-dessus)

  • Depuis l’extérieur, les dormants «périphériques» sont visibles car ils passent devant les nez de murs, également visibles. Mais tous ces éléments sont de couleur claire et sont donc dissociés des façades sombres. Ils apparaissent comme partie intégrante de l’ouverture, en toute discrétion.
  • Au niveau des intersections de volumes, les montants de menuiserie ont été totalement intégrés dans les murs afin d’être complètement invisibles, donnant l’impression que la fenêtre se prolonge à l’intérieur.
  • Depuis l’intérieur, les montants (périphériques ou au niveau des intersections) sont donc presque invisibles. Les montants entre vitrages, quant à eux, sont légèrement plus présents mais leur section permet la mise en place de ces très grandes feuilles de verre.

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En pied de menuiseries, les architectes ont décidé de mettre en place un décaissé, ce dispositif leur permet de :

  • Donner l’impression que le vitrage continue indépendamment de la dalle : dissocier visuellement le sol de la façade
  • Intégrer discrètement les réseaux (chauffage et électricité)
  • Éloigner les visiteurs des vitrages (sécurité et propreté)

 

Bibliographie :

– El Croquis n° 152/153 : Herzog & de Meuron 2005-2010

– Architectural Guide Basel – Birkhauser – New Buildings in the Trinational City since 1980

 

Photographie de présentation par Honorine van den Broek.

Auteur : Quentin Aubry – quentin.aubry@nantes.archi.fr

Voyage effectué du  07 Décembre au 12 Décembre 2014.