Bilbao, cette ville que nous connaissons pour le grand Guggenheim de Gehry. Cette ville que nous ne connaissons pas beaucoup, parce qu’il y a aussi un grand projet de rénovation urbaine et culturelle derrière de cette ville cosmopolite.
Pendant un voyage fait en août 2015, j’ai visité Bilbao. Beaucoup de gens m’avaient dit : « Allez ! C’est une belle ville, et ce n’est plus industriel ni moche »
La photo aérienne de l’agglomération de Bilbao révèle à la fois sa géographie et son histoire : de part et d’autre de la Ria, estuaire du fleuve Nervión, l’étroitesse de la vallée enserrée par les montagnes a contraint la ville à se développer de façon dense.
La cité médiévale fondée au XIVe siècle dans un méandre du fleuve devient un port au XVIe siècle et se déploie progressivement le long de ses berges. L’agglomération s’urbanise en direction de l’océan, différemment sur sa rive gauche et sa rive droite. La crise des années 1990 a brutalement transformé les berges en friches industrielles, libérant des sols particulièrement bien placés ; c’est sur leur transformation que la métropole fonde aujourd’hui son projet urbain et économique.
Alors, notre voyage commence en Zorrotza, quartier périphérique où nous sommes logées. Pour aller au centre de Bilbao, nous prenons le train (Renfe) jusqu’à la gare centrale de Abando. Cette gare a été réhabilitée. Le hall et ses vitraux, les nouvelles ouvertures pour faciliter l’accès aux quais et leur éclairage naturel, et deux nouveaux quais couverts par une marquise en bois ont été construits. Cette réhabilitation, et d’autres ont été confiées à de jeunes équipes locales qui ont joué sur les mêmes matériaux et le même langage technique que le métro (acier, pierre et verre). Ainsi, le système de transports métropolitain affiche-t-il son identité.
De lá, nous prenons aussi le métro jusqu’à Casco Viejo. Nous voyons que le concept de stations a évolué pour privilégier l’espace et la luminosité. Sous l’influence de Norman Foster, la « caverne » s’est ensuite agrandie pour intégrer tous les services. La collaboration entre architectes et ingénieurs a été indispensable. Foster, amoureux des tunnels, a voulu que la dimension « dramatique » de leur construction soit respectée : « Chacun doit pouvoir sentir qu’il est sous terre, en y vivant une expérience intéressante et agréable. Une part de cette philosophie a à voir avec l’esprit, la poésie et l’émotion de voyager. Elle a aussi un aspect pratique et esthétique ». Les accès ont été surnommés ici des « fosteritos » (petits Fosters), et ils sont l’image dynamique de l’entrée sous terre.
Nous marchions dans les rues du Casco Viejo, l’ancien quartier de Bilbao. La cartographie irrégulière de ces rues disparait quand nous arrivons à Las 7 Calles, sept rues orthogonales où nous nous sommes arrêtés pour manger et boire. Les « pintxos » sont typiques là, et le serveur nous dit que la vie nocturne s’est elle aussi animée depuis la croissance de Bilbao. Il nous invite à aller à Plaza Nueva pendant la nuit, une belle place où nous pouvons manger pas cher et avec une bonne qualité.
Avant de traverser le fleuve sur le pont, nous regardons les deux quais (rive gauche et rive droite). Il y avait sur les berges de la Ria une grande activité portuaire. La richesse de la ville était fondée sur une monoactivité (sidérurgie, chantiers navals, biens d’équipement) et la crise l’a durement frappée : décadence industrielle, taux de chômage supérieur à 20%, dégradation de l’environnement et du tissu urbain, marginalisation sociale…
La crise industrielle rend manifeste quelques problèmes structurels et, d’autre part, le développement d’une technologie compétitive ne peut générer de nombreux emplois.
Bilbao attirait par l’emploi disponible et les revenus les plus élevés d’Espagne mais l’environnement et la qualité de vie se sont détériorés.
Le Paseo de Urbitarte, pour lequel nous continuons la visite, est considérée par les habitants comme une des actions la plus intéressante du projet urbain. La transformation des berges en promenades a favorisé la croissance des activités ici. Les zones portuaires sont devenues des parcs, les quais en promenades et les terrains industriels en nouveau centre.
Quand nous arrivions à Zubi-Zuri, le pont de Calatrava, nous nous demandions si c’est vrai que les habitants le détestent. Donc, nous commencions à parler avec les gens qui traversent la passerelle. « C’est dommage, parce que c’est très moderne mais tu dois faire attention ! Quand il pleut, presque toujours, c’est dangereux et beaucoup de gens tombent. Maintenant il y a un tapis pour l’améliorer », nous dit une dame.
La passarelle conçue par Santiago Calatrava, l’idée a été d’apporter à Bilbao le design technique et élégant de sa structure tendue, éclairée de l’intérieur. Promenade empruntée chaque jour par de nombreux Bilbaiens qui rejoignent ainsi l’Ensanche, ses rues commerçantes et ses bureaux, elle a symbolisé le renouveau de la ville, aux côtés du Guggenheim et du métro. Aux bords du musée et de l’hôtel de Ville, elle a été la première action menée sur les berges, transformées depuis en promenade. Mais, c’est vrai, que pour la vie quotidienne des habitants, ce n’est pas très populaire.
Un monsieur nous dit qu’avant, il n’y avait pas des ponts pour traverser la Ria. Seulement le pont transbordeur (construit en 1893). Alors, pour lui, c’est une grande décision d’avoir plus de ponts et plus de flux qui travers la Ria.
Nous continuons et, finalement, nous arrivions au célèbre Guggenheim de Frank Gehry (image 6). La première image que nous voyons est la grande « façade » asymétrique, comme un bateau. Aussi l’araignée de Louise Bourgeois qui a l’air de protéger le bâtiment.
Le « Guggy », ainsi que le surnomment les Basques, a radicalement changé l’image de Bilbao dans le monde et il symbolise la nouvelle fierté de ses habitants. Son succès d’aujourd’hui ne doit pas faire oublier combien le pari a semblé fou lorsque la Ville et les institutions basques ont décidé sa construction.
Au début, avec les conditions défavorables, comment croire que Bilbao, ville si peu attrayante, puisse accueillir l’un des plus prestigieux musées du monde ?
Une fois surmontée la phase d’incrédulité, il était clair que ce musée allait permettre d’atteindre d’autres buts. Le premier objectif a été de réaliser un monument à l’architecture exceptionnelle, conçu par un architecte prestigieux, qui a offert à ce projet son talent, son enthousiasme et son expérience. Y exposer le meilleur de l’art moderne et contemporain, grâce à la collection Guggenheim complète et aux acquisitions qui donnent une personnalité au musée, était essentielle.
Le bâtiment devait être emblématique et singulier, la première œuvre d’art du musée. Le projet de Gehry a été choisi de manière personnelle par l’organisation du projet de musée. Par contre, le choix du site revient à Thomas Krens (le directeur du Guggenheim), qui a proposé une promenade sur les berges, pressentant qu’il y avait peut-être là un site adéquat malgré un environnement très détérioré (« La Arquitectura moderna en Bilbao – Damian Roda ; préface de Nieves Basurto Ferro »)
Le Guggenheim a assuré une publicité extraordinaire à Bilbao, qui a gagné une image de capitale européenne, moderne, ouverte et dynamique, indispensable pour attirer visiteurs et investissements.
Malgré tout, nous n’avons pas pu entrer, parce qu’il y avait un événement privé.
Alors, nous avons continuée la promenade jusqu’à la place de Federico Moyúa, construite pendant les années 40 et rénovée en 1997, connue comme la place elliptique. Sa forme d’ellipse et ses jardins de style anglais et français, donnent à cette partie de la ville d’une identité propre et très originalle.
Là, nous prenons le métro, de nouveau, pour aller à San Mamés. Ici, nous trouvons le stade de football du team Athletic de Bilbao. À Bilbao, et presque dans la totalité d’Espagne, le football constitue un aspect social important. Le nouveau stade, inauguré en 2013 et dessiné par César Azkarate, est reconnu surtout par sa façade. Une structure métallique avec des feuilles d’ETFE.
C’est intéressant de voir un stade que s’adapte aussi à la nouvelle identité de la ville.
Encore, le train. Nous le prenons jusqu’à la gare de Sarriko pour bien connaitre ce projet de gare de Foster, que a été primée par ailleurs en tant que meilleure station de petite taille. Et, en fait, cette est différente de toutes les autres. Elle manque de stations « fosterito » d’entrée, parce que, cette gare a été fouillée par un faux tunnel de 20 mètres de profondeur, dont le verre chapiteau fournit la lumière naturelle de la station. Elle est recouverte par une verrière qui éclaire les quais à 80 mètres de profondeur. La mezzanine est suspendue à mi-hauteur. Finalement, nous prenons le dernier train pour aller à notre logement, en Zorrtoza.
A la réflexion après ce beau voyage culturel, je pense que l’exemple de Bilbao est exceptionnel comme projet d’évolution à la fois de ville et de culture collective.
Le changement à partir de l’architecture, de l’art et de la pensée, est, à mon avis, nécessaire pour obtenir une ville attractive pour les visiteurs, mais, surtout, pour les habitants.
La renaissance d’une ville que avait été prévue comme un succès et qui, finalement a obtenu le renom qu’il mérite. Le « Guggy » n’est pas unique à Bilbao, mais je veux, vraiment, revenir pour pouvoir le visiter.
Patricia Fernández
Voyage du 17/08/15 au 19/08/15
Bibliographie:
– Notes d’urbanisme d’années précédentes
– Architectures contemporaines Espagne – Antonio Pizza
– La Arquitectura moderna en Bilbao – Damian Roda ; préface de Nieves Basurto Ferro
– Bilbao : guia de Arquitectura arkitekturaren gida. / GARCIA DE LA TORRE, Bernardo
– Wikipedia