A la suite de la guerre Sino Japonaise de 1894-1895, Taïwan est cédé au Japon et devient une de ses colonies. La domination japonaise dure une cinquantaine d’année jusque la fin de la Seconde Guerre Mondiale, dans le traité de San Francisco (1951). Taïwan, a été successivement colonisée par les immigrants venus de Fujian, les Hollandais, les Portugais, avant d’être repris par la Chine puis le Japon, à tel point qu’il est aujourd’hui difficile de retrouver la culture originale Taïwanaise. Mais l’occupation japonaise a profondément marqué la culture du pays, et des vestiges de la domination sont encore visibles, autant dans la politique, la linguistique, la cuisine, le sport que l’architecture taïwanaise.

TRACES URBAINES

A l’époque de l’arrivée japonaise, Taïwan était en crise : les populations souffraient d’épidémies et des révoltes étaient souvent lancées par les Taïwanais natifs. Les peuples aborigènes parlaient différentes langues, créant de nombreux problèmes de communication, augmentant les hostilités. Malgré les obstacles, les Japonais installèrent des industries notamment pour la production de sucre, développèrent l’éducation, des réformes agricoles, et entraînèrent, et manière générale, la modernisation de Taïwan.

Plan de Kaoshiung à l’époque portugaise (carré blanc du plan suivant)- plan actuel de la ville et des districts. Le système de routes et boulevards très réglés de l’époque japonaise sont encore bien visibles

Plan de Kaoshiung à l’époque portugaise (carré blanc du plan suivant), rédigé par les français lors de leur tentative de colonisation – plan actuel de la ville et des districts. Le système de routes et boulevards très réglés de l’époque japonaise sont encore bien visibles

Les villes principales furent réorganisées. Le port de Kaoshiung en est sans doute une des formes les plus flagrantes. Créé bien avant l’arrivée des colons, et appelée Takau, la ville vit son nom changer en Tancoia sous les Portugais, puis en Kaoshiung à l’arrivée des Japonais. Kaoshiung s’est développée pour devenir un port florissant du Sud de Taïwan. La ville s’est considérablement agrandie avec l’arrivée du train en 1900, la reliant à la ligne ferroviaire Nord-Sud. Les arrivées massives de populations entraînèrent le développement de plusieurs plan d’expansion successifs, déplaçant à chaque fois le centre administratif et économique. Hamking et Yangchen District furent les premiers quartiers à être reliés à la ville, suivis de Lingya district lors d’une seconde phase d’agrandissement. En 1936 le gouvernement lance une troisième expansion basé sur un système de routes en damier qui marque encore la ville. L’ensemble urbain de Kaoshiung actuel, de 2,77 millions d’habitants, possède maintenant plusieurs centres forts.

Immeuble datant de l’époque coloniale, port de Kaoshiung

Immeuble datant de l’époque coloniale, port de Kaoshiung

TYPOLOGIES DES BÂTIMENTS

Les parcelles des habitations ont été tracées fines et en longueur, comme les anciennes maisons tokyoïtes. Les façades comportent généralement trois travées encadrées par quatre pilastres, soit droits, soit marqués par des colonnes aux chapiteaux ornés de fruits exotiques pour les façades plus riches. Deux ou trois étages principaux, auxquels des extensions en tôles ont été ajoutées. En rez de chaussée, la façade se recule pour laisser un large passage aux piétons et les innombrables scooters garés dans tous les sens. Les petits restaurants s’y étendent et installent leurs tables et leur cuisine souvent extérieure. En passant un rideau de plastique on peut pénétrer dans la salle de restauration où un ventilateur et un poste de télévision rassemblent l’attention de la plupart des clients. Un escalier discret permet aux habitants d’accéder à l’étage, tandis que le propriétaire de la boutique habite en fond de parcelle. Sur les petits immeubles datant de l’époque japonaise on peut encore voir quelques menuiseries en bois et des façades recouvertes d’enduit ou de béton gris. Les habitations un peu plus modernes gardent la forme fine des parcelles mais sont couvertes d’un parement de mosaïque claire.

Typologie classique des parcelles des grandes villes taiwanaises

Typologie classique des parcelles des grandes villes taiwanaises

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Extensions sauvages des derniers étages/ Vue d’un immeuble, Sanchong district, Taipei

PATRIMOINE ANCIEN

Ancien restaurant japonais, transformé en salon de thé par l’association Takao Kaisha, Kaoshiung

Ancien restaurant japonais, transformé en salon de thé par l’association Takao Kaisha, Kaoshiung

Il subsiste encore quelques bâtiments traditionnels japonais, mangés au fur et à mesure par l’appétit des investisseurs. Il s’agit souvent de résidences d’anciens officiels ou professeurs nippons, en bois et aux portes coulissantes de papier. Cependant, la notion de «patrimoine sauvegardé» semble plus  relatif et flexible qu’en France, et j’ai pu voir une maison traditionnelle la veille référencée comme bâtiment historique se faire détruire le lendemain par des bulldozers. Dans l’ancien quartier portuaire de Kaoshiung une association (takao kaisha) se bat encore pour préserver et mettre en avant le patrimoine qui reste. Installés dans un ancien dortoir dont il ne reste que la moitié, ils militent pour le quartier, proposent des visites historiques et des ateliers de restauration de ce dortoir et des maisons environnantes. Ironiquement, lorsque je vais les visiter, un chantier vient de commencer à côté et une machine creuse impitoyablement la terre. Derrière, un ancien restaurant transformé en maison de thé résiste à la pression immobilière.

Ci dessus et ci dessous: Ancien dortoir japonais, centre de l’association Takao  Kaisha, Kaoshiung

Ci dessus et ci dessous: Ancien dortoir japonais, centre de l’association Takao Kaisha, Kaoshiung

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Maison japonaise détruite par les buldozers, Shidà district,Taipei

Maison japonaise détruite par les buldozers, Shidà district,Taipei

Association Takao Kaisha

Association Takao Kaisha

 

Bibliographie :
Vestiges of Japanese Colonialism in Taïwan, Nobue Homma
Kaoshiung official website
Wikipedia / Ville de Kaoshiung
Takao Kaisha / takaokaisha.org
Carnet de voyage

 

Honorine van den Broek d’Obrenan – voyage été 2014

honorine.van-den-broek@laposte.net