QUARTIER COSMOPOLITE À CHEVAL ENTRE DEUX MUSÉES
Le quartier est reconnu pour être une zone multiculturelle du pays, avec des visiteurs nationaux et internationaux. Ici est possible de profiter des offres variées sur les plans gastronomiques, artistiques, commerciaux et architecturaux.
La ville de Mexico, capitale du Mexique, est une mégapole de 2 000 km². Située dans une vallée, au Centre-Sud du pays, elle est à 2 240 m d’altitude. Avec 25 millions d’habitants, elle est considérée comme la quatrième agglomération la plus peuplée du monde.
Le quartier cosmopolite de Polanco se divise en six zones ; localisé à l’ouest de la ville, au nord du bois de Chapultepec, dans la délégation « Miguel Hidalgo ». La zone exerce une incontestable influence sociale et financière sur la ville. Elle rassemble les consulats, des restaurants et des magasins de luxe.
Pour aborder le quartier, je décide de commencer en déambulant tôt le matin dans ses larges rues et les avenues arborées. Après un petit-déjeuner traditionnel, chilaquiles et un café au lait, muni du plan de métro de la ville, avec 220 km reparties en 12 lignes, je découvre un Polanco et ses maisons coloniales aux magnifiques fenêtres richement décorées.
Une météo clémente tout au long de l’année, avec des températures moyennes toujours à deux chiffres, permet de profiter d’une température de quinze dégrées et d’un temps ensoleillés en cette matinée de novembre. Au moment du voyage c’était la première fois que je visitais la ville en étant étudiante en architecture, donc j’ai apprécié la ville et le quartier sous un autre regard.
Polanco prend son nom du fleuve qui le traversait, par l’avenue actuellement connue sous le nom de Campos Elíseos. Suite à la croissance urbaine, après la révolution mexicaine, la ville avait besoin de nouveaux logements et de nouveaux espaces publics. C’est alors, que Polanco, le quartier, fut dessiné en profitant de la prolongation de l’avenue Paseo de la Reforma qui conduit vers le centre-ville. Ainsi le quartier est conçu par le cabinet mexicain d’architecture “De la Lama & Basurto”, durant l’année 1938, même année que l’expropriation du secteur pétrolier.
Les premiers habitants furent des résidents du centre-ville de Mexico. Issus d’une classe sociale moyenne-supérieure, les habitants voulaient rester à proximité de l’épicentre urbain. Depuis ses origines Polanco a été le siège des communautés installées au Mexique, tels que la communauté juive, espagnole, allemande et libanaise, et ces communautés sont encore représentés dans le quartier, de nos jours.
À la fin des années 1960 la zone de Polanco a été fortement construite, avec de grands immeubles d’habitation. Dans les années 1970, le quartier a subi un léger dépeuplement accentué par le tremblement de terre qui a fortement frappé la capitale mexicaine en 1985. Cependant, dès la fin des années 1990 un boom immobilier a touché la zone ; amplifié par la mise en place des galeries d’art, boutiques exclusives, hôtels de luxe, restaurants gastronomiques et d’un important centre d’affaires.
Quand le quartier a été érigé, on pouvait remarquer une forte utilisation de la voiture. Influencé par l’idée des quartiers cité-jardin, concept théorisé par l’urbaniste britannique Ebenezer Howard à la fin du 19e siècle. Le plan d’urbanisme local, établissait que les maisons devaient être implantées au centre de la parcelle avec au moins trois mètres de recul.
Un jardin les entouraient, avec une clôture métallique qui permettrait la continuité de l’espace public et une lien visuelle vers l’extérieur. L’ensemble de ces caractéristiques étaient peu habituelles à l’époque dans le pays.
Le style architectonique qui distingue les maisons individuelles est le néobaroque. L’architecture, encore une fois, a été utilisée comme moyen pour montrer la richesse et le luxe. Elle s’exprime par le biais d’une ornementation chargée : des formes organiques sculptées sur la pierre volcanique étaient alors placée autour des ouvertures.
Actuellement déambuler dans le quartier est une expérience envoûtante. Ses rues arborées et ses villas coloniales se mêlent à un quartier d’affaires et de Culture. De plus la fameuse avenue, Presidente Mazaryk est l’adresse incontournable de la capitale des marques de luxe. Cette confluence des différentes activés lui donne une importance sociale et économique, et en même temps rendent le quartier vivant à toute heure.
MUSÉE NATIONAL D’ANTHROPOLOGIE DE MEXICO (1964) // PEDRO RAMIREZ VAZQUEZ
Demi-siècle de culture et d’architecture pour définir une nouvelle identité
Le plus grand musée du pays a une surface d’environ huit hectares. Il est construit en marbre et en roche volcanique, pour rendre hommage aux cultures ancestrales, antérieures à l’arrivée des colonies espagnoles, chez qui est né le métissage qui forme la nationalité mexicaine et également afin de rendre hommage aux communautés autochtones actuelles. Le musée consacré à l’histoire du territoire mexicain propose une description chronologique : depuis les tribus nomades jusqu’aux Aztèques, en passant par les Mayas et Toltèques, il est alors considéré comme le « temple » des cultures mexicaines.
Le musée se situe dans le « poumon » de la ville, le bois de Chapultepec, au sud de Polanco. Il est composé de vingt-trois salles thématiques qui s’étendent sur une surface de 44.000 m². Douze de ces salles sont dédiées à l’archéologie et onze à l’ethnographie. Le bâtiment, chef-d’œuvre de la muséographie mondiale, a été conçu par le célèbre architecte mexicain Pedro Ramírez Vázquez (1919-2013), qui a également réalisé le stade Aztèque et la Basilique Notre-Dame-de-Guadalupe à Mexico.
Après l’entrée se trouve la cour centrale, autour de laquelle s’organisent quatre édifices, revêtues au premier étage par des treillis en aluminium et à formes géométriques imitant des serpents.
La cour permet l’accès aux différentes salles et elle est divisée en deux zones :
La première est équipée par une énorme fontaine en forme de parapluie, couvrant une surface de 82x54m. Elle fut fabriquée en aluminium soutenue par une seule colonne en béton et suspendu par 80 câbles d’acier, d’où l’eau tombe en pluie sur le sol. Autour de la colonne un bas-relief en bronze évoque un arbre mythologique orné de gravures d’aigles et de jaguars : symboles importants des cultures mésoaméricaines.
Dans la deuxième zone de la cour se trouve un étang représentant le lac sur lequel la capitale a été fondée. Sur le côté, une sculpture en forme d’escargot de mer, œuvre d’Iker Larrauri, est nommée « Sol del viento » (Le soleil du vent), elle imite les sons des instruments préhispaniques lorsque le vent la traverse.
Dans la salle Mexica se trouve la fameuse Piedra del sol (Pierre du Soleil) appelée « Calendrier Aztèque ». C’est l’objet qui attire le plus de visiteurs. Il est sculpté sur un monolithe gigantesque de 3,5 m de diamètre et pèse 24 tonnes. Le monolithe date du 15e siècle et représente la cosmologie des habitants de la région de Tenochtitlán. Il a été découvert, par hasard en 1790, lors des travaux de pavage de la place principale du pays, dans le « Zocalo ».
La particularité de l’ensemble est caractérisée par la cour intérieure, le noyau du projet. Elle offre la possibilité de circuler librement, même si un parcours est suggéré suivant l’ordre chronologique. En montant à l’étage, les formes géométriques en aluminium projettent des ombres sur les circulations en créant une sensation d’apesanteur à l’intérieur des salles.
En concevant l’espace central, le seul obstacle était la pluie et la chaleur des jours d’été. Ainsi, avec la volonté de créer un espace à ciel ouvert, le résultat est un espace non-fermé mais protégé par une fontaine et rafraîchi par un étang végétalisé. La fontaine représente également le respect que les cultures indigènes portent à la Nature, et l’importance qu’elle porte, toujours, aux groupes ethniques du pays dans leur quotidien. De plus une approche sensorielle est entraînée par les sons, odeurs, couleurs, formes et textures.
Au moment de la visite l’édifice a symbolisé pour moi plus qu’un musée, une rencontre avec mes racines culturelles, en plus j’ai pu visiter un des projets étudiés dans mes cours d’histoire de l’architecture mexicaine. Les plans et les coupes sont devenus des volumes et ont pris la forme d’un espace qui préserve l’héritage d’une nation. J’ai vu en vrai comment l’architecte a réussi à conserver dans le patio, sans aucune imitation, sans aucune répétition, les proportions et le critère de l’architecture maya, à savoir, un rez-de-chaussée sobre et paisible sous un étage en saillie, avec ses claustras qui font jouer la lumière et les ombres.
La visite m’a permis de constater pourquoi lors de la VIII Biennale d’Art à Sao Paulo en 1965, l’architecte de la modernité au Mexique a été lauréat du grand prix et la médaille d’or, grâce à la réalisation de ce projet.
MUSÉE SOUMAYA (2011) // FERNANDO ROMERO
Une collection privée d’art sauvegardée par une structure éblouissante
Le récent musée d’art Soumaya se situe au nord de Polanco, le lieu était une ancienne fabrique de papier. Ouvert depuis mars 2011, il appartient au milliardaire mexicaine, d’origine libanaise, Carlos Slim. Le musée est consacré à la diffusion de sa propre collection et est géré par l’intermédiaire de sa fondation. D’autres collections d’art internationales sont réparties sur six étages. Le musée abrite plus de 60,00 œuvres crées entre le 15e et le 20e siècle.
Son propriétaire acheta un grand nombre de sculptures de Rodin dans les années 1980, alors que leur valeur était à un niveau faible. Ces sculptures sont exposées aujourd’hui au dernier étage, sous un gigantesque dôme. Le musée «Soumaya » porte le nom de l’épouse de Carlos Slim, décédée en 1999.
Sa surface, de 6 000 m², est repartie sur six étages. La conception architecturale du musée a été confiée à l’époux de l’une des filles de Carlos Slim : l’architecte mexicain Fernando Romero (1971). Ce dernier a travaillé avec Rem Koolhaas au sein de l’OMA à Rotterdam de 1997 à 2000.
Ma première impression, après avoir franchi l’accueil, est d’entré dans un grand espace épuré où le sol, murs, escalier et un haut plafond, sont en blanc. A mon avis un peu moins réussi que l’extérieur, car la sculpture du Rodin qui a été placée à l’entrée n’a pas été mise en valeur, on ne peut pas bien l’apprécier dans un espace si immense car elle parait de petite taille.
Le musée comprend, également, un auditorium pour 350 personnes, une bibliothèque publique, des bureaux et une cafétéria. Il ouvre sept jours sur sept, et l’entrée est libre tout au long de l’année.
L’architecte définie son œuvre comme «une construction sculpturale et contemporaine qui se distingue par une silhouette amorphe qui reflète la diversité de la collection».
Sa structure basée sur des lignes courbes multidirectionnelles, prend une forme asymétrique et organique. Elle est recouverte par une peau continue des 16,000 hexagones en aluminium. Un des principaux défis de cette structure fut la situation sismique de la ville. Pour le résoudre l’architecte a pensé à une composition d’hexagones qui ne se touchent pas pour permettre à chaque pièce de bouger indépendamment. Ce sont des hexagones qui varient légèrement dans leurs dimensions. La pièce « type » est un hexagone de 46 centimètres. L’ensemble des figures géométriques produisent des perspectives différentes du bâtiment selon le point de vue, tout en générant du mouvement.
L’étude structurale complexe du bâtiment et l’ingénierie 3D de l’édifice a été confiée à l’entreprise Gehry Technologies (GT), fondée par l’architecte Frank Gehry. La réponse a été donnée en combinant à la fois des outils de modélisation des données du bâtiment et de gestion. Même pour GT, la façade fut un défi de taille majeure.
L’intérieur du bâtiment tout en blanc, crée un contraste avec sa façade éblouissante et argentée. Une structure interne soutient la rampe hélicoïdale qui monte, tout autour de l’édifice, jusqu’au sixième étage. Le bâtiment qui ne montre pas une façade définie, grâce à sa forme organique, compte 10.000 m² de surface. Au dernier étage se trouve un gigantesque dôme, qui permet un éclairage naturel.
Le concepteur cherche à créer un nouvel usage des musées : un lieu de rencontre où tous les visiteurs ont la possibilité d’assister aux conférences, bouquiner, et même y manger. Tout cela afin de déclencher une nouvelle dynamique dans le quartier.
Dans les quatre années, après son ouverture, le musée a accueilli 5 millions de visiteurs. Ce chiffre le place comme le musée privé le plus visité au monde. Malgré le initial rejet par rapport à sa forme vue comme capricieuse, je considère il est désormais devenu un véritable passage obligatoire pour les touristes de la ville et un emblème de l’architecture contemporaine au Mexique.
Dalila DELGADILLO MORALES
delgadilo.dalila@gmail.com
Voyages : du 08/12/2010 au 12/12/2010 et du 08/11/2013 au 11/11/2013
Bibliographie :
- Architecture d’Aujourd’hui 129, 1966, p. 12-15
- http://www.tourdf.com/historia-colonias/historia-de-polanco#
- http://polancoayeryhoy.blogspot.fr/
- http://www.mna.inah.gob.mx/museo/historia/arquitectura-y-construccion.html
- http://www.mexicoescultura.com/recinto/54490/museo-nacional-de-antropologia.html
- http://www.lapresse.ca/arts/201208/11/01-4564304-musee-soumaya-de-mexico-la-caverne-de-carlos-slim.php
- http://www.cnnexpansion.com/obras/2011/02/28/soumaya-museo-inauguracion-slim-carso