«Les belles villes ne sont pas des chaos, mais des multiplicités de structures croisées, d’intelligibilités subtilement agencées». Henri Gaudin

Venise a cette faculté unique de provoquer l’étonnement lors de sa visite. Venise, avec ses ruelles tortueuses, l’ambiance spéciale de ses placettes, et la beauté de ses canaux et de ses églises, est une ville née de la mer et tournée vers la mer. Elle a de tout temps su batailler pour préserver son indépendance. De son glorieux passé, elle a gardé des vieilles demeures qui, aujourd’hui, se sont transformés en musées qui témoignent de son histoire.

Venise, c’est du charme presque à tous les coins de rue, un étrange mélange entre le déjà-vu et l’étonnement de la découverte, la carte postale et le demi-mot. Il faut prendre le temps de la découvrir, sacrifier son sens de l’orientation, quitter la foule et se perdre dans ses ruelles et impasses pour découvrir l’amour que cette ville entretient avec la mer.

En effet, autant attendue qu’inattendue Venise surprend en bien comme en mal. C’est une bonne surprise de découvrir un tel endroit dans cette dynamique d’étude. Venise est une ville où toutes les activités sont mises en avant et sont tout aussi visibles qu’ailleurs. C’est surprenant de voir comment la ville et sa vie s’organisent. Malgré ses formes construites figées dans le temps, son immobilisme l’amène à savoir se renouveler et conserver les attributs nécessaires au bon déroulement d’une cité.

Les problématiques telles que l’étalement urbain ou le trafic automobile naturellement écartés, il semble que d’autres; tels que la gentrification ou le développement économique sont posées de manière complètement différente. Un territoire complètement à part donc, avec ses propres paradoxes: le tourisme en premier plan, tout aussi indispensable et vital que destructeur. L’image de ces gigantesques paquebots sortant du canal de la Giudecca et partant dans la lagune semblent être ignorant de la question de l’écologie. En effet, ces monstrueux paquebots de croisière qui défilent devant la place Saint-Marc, écrasent de leur masse les toits de Venise et provoquent l’inondation de la zone urbaine.

Ce voyage a été l’occasion pour moi de découvrir la «biennale d’architecture » pour la première fois. En allant à Venise, je m’étais donné la règle de ne pas faire de recherche «approfondie» sur la biennale d’architecture pour me laisser imprégner de l’ambiance et de mon ressenti sur ce qui m’était donné à voir.

Biennale_2014

A la biennale le sujet semblait intéressant autour des éléments « fondamentaux » de l’architecture, mais la plus grande partie des expositions m’a peu convaincue. Je pense que l’exposition se perdait dans le contraste entre les travaux documentaires et les travaux plus prospectifs ce qui est un peu déstabilisant puisque il devient difficile de comprendre clairement le propos et le but de cette exposition.

Mais à ma grande surprise, la deuxième salle de l’Arsenal dans laquelle je suis rentrée, accueillait le pavillon du Maroc. D’autant plus que le sujet du pavillon marocain faisait partie de mon sujet de mémoire.

-Le pavillon marocain, reflets d’une tradition architecturale millénaire:

Le commissaire scientifique de cette manifestation est l’architecte marocain Tarik Oualalou, fondateur de « Kilo Architectures ».

Pour cette 14 ème édition de l’exposition internationale d’architecture de la Biennale de Venise, Rhem koolhas a choisi comme thème «es fondamentaux», et il proposait de jeter un regard nouveau sur les fondements du métier d’architecture. Intitulé « Fundamental(ism)s » en clin d’œil au thème général proposé, le Pavillon du Maroc, présent à Venise pour la première fois de son histoire, développe ce thème à travers sa contribution à la grande aventure architecturale du XXe siècle, d’une part, et met en parallèle un instantané de la création contemporaine, d’autre part, en posant la question de l’Habitabilité du Désert. En effet, pour le Maroc il s’agit de la première participation à la Biennale en tant qu’invité d’honneur ce qui est une bonne occasion pour exposer la richesse culturelle du pays à travers un patrimoine architectural qui reflète finalement sa diversité et son aventure.

Je pense que le fait que le Maroc soit l’invité d’honneur de cette édition témoigne en quelque sorte de l’intérêt manifesté pour son patrimoine architectural, étant donné qu’il ne dispose pas seulement d’une histoire architecturale millénaire qui a été finalement enrichie par différentes civilisations (romaine, berbère, arabo-musulmane, juive), mais il a aussi bénéficié de l’apport et de la valeur d’une architecture moderne au cours du siècle passé.

La salle est sombre et le temps que le regard s’acclimate à l’obscurité, on découvre les stèles sur lesquelles sont disposées les différentes maquettes dans une trame rigoureuse. On marche les pieds dans le sable qui a été importé directement du Sahara marocain.

Au plafond, se trouve un écran où est projeté avec un traveling cinématographique des bâtiments représentatifs de la marche vers la modernité qu’a connu l’architecture marocaine au cours du siècle dernier.

A part ce bilan chronologique de la production architecturale marocaine, la deuxième partie de l’exposition se concentre sur la question du Sahara et son habitabilité, et là plusieurs architectes, marocains et étrangers ont été invités à réfléchir sur la question «comment habiter l’habitable?»

La thématique choisie par les organisateurs du pavillon est celle de «l’architecture du désert»; ce que je trouve intéressant, dans le sens ou il est important de mener une réflexion architecturale sur un territoire qui est au centre de l’identité contemporaine marocaine mais à la marge et aux limites de la pratique architecturale qui est le Sahara.

J’ai trouvé aussi intéressant l’utilisation du sable au sol qui renvoie au fait que le Maroc ait été un véritable bac à sable pour les multiples expérimentations architecturales et urbanistiques du monde moderne.

Imane Achraf

imane.achraf91@hotmail.fr

Voyage octobre 2014

Sources:

– Fundamentals, 14 biennale de architettura Venezia 2014

Milan :L’Arca Edizioni, 2014.-92 p. : photogr. ; 30 cm.N° 8 spécial de la revue Arca international.

-Fundamentals catalogue : 14th international architecture exhibition = la biennale di Venezia, 14 mostra internazionale di architettura / director Rem Koolhaas:Exposition, 2014, VeniseVenise :Marsilio, 2014.-573 p. : ill. ; 26 cm.

-Article: Habiter le Sahara, un défi architectural- magazine marocain Telquel du 22juillet 2014.