L’histoire de Venise et ses habitants est intimement liée à sa relation avec l’eau méditerranéenne. La mer sera un soutien, un véhicule de protection de ses habitants. L’homme fera de la nécessité d’obtenir un refuge, la vertu avec laquelle générer une manière de s’adapter à son environnement. Depuis les premières colonisations humaines, de petits peuples de pêcheurs, la vie de ses habitants s’est développée ayant pour référence l’horizon marin.

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À Venise, la beauté arrive de la main de l’eau, qui génère la vie. Ses eaux toujours imbriquées à la vie, ils construiront la beauté de différents espaces.

La rue proprement dite, à peine il existe dans la ville. Les espaces du piéton seront nommés en dépendant de sa relation avec le liquide. Ainsi les bords pierreux près des canaux, seront dénommés riva ou fondamenta selon son étendue.

Ils reçoivent ce nom les promenades étendues près de l’eau là où le Grand Canal débouche en lui faisant une lagune. La Fondamenta, terme relatif à la construction, seront les espaces de bord entre les façades des édifices et des canaux.  D’une moindre largeur au riva, elles trouvent liées étroitement aux édifices auxquels ils donnent un accès. Nous pourrions dire qu’il s’agit des prolongations des mêmes édifices, même les portiques.

Nous observons comme Venise  nomme ses espaces, à partir de son action de d’avoir des contacts avec l’eau. Cela qui fait semblant d’être rue simple est aussi nommé dans une relation à l’eau et son niveau. On se nommera rivière terra. L’espace libre dans la ville se nomme champ.

L’espace de Sain les Cadres, dénommée Piazza et piazzetta, comme lieu représentatif de la ville.

Telle, elle est, la relation entre la ville avec l’eau que les vénitiens dénomment terra ferma au littoral Veneto proche, les habitants d’une ville – bateau.

 Nous parcourons différentes eaux avec lesquelles Venise acquiert ses formes.

EAU AÉRIENNELes toitures de Venise

“Les toitures de Venise sont plein de fantaisie. Quand on les regarde depuis les toits du PalaisDucal, on est devant une mer de plomb. Le plomb est un matériel exceptionnel pour ces toits ; il est épais et il a acquis la couleur appropriée. Ces toitures ressemblent à neige en printemps”                                                                                                      Louis Kahn

Les toitures à Venise retournent la terre volée au ciel, à travers l’intégration avec l’environnement, dans sa lumière et sa couleur. Une ville est configurée, où le terrain sec, bâti, pose sa regard sur le ciel. Venise, de la même manière, est tout un réseau de pierre et d’eau.

Les façades en pierre des bâtiments, elles nous montrent leur volumétrie grâce à leurs successifs lavages produits par le glissement de l’eau de pluie. L’eau excave, use la pierre dans sa verticalité, au même temps qu’elle dévoile des nouvelles lumières et des nouvelles ombres. Certainement, c’est la vie.

EAU COULANTE ET PRÉCIEUSEimpluvium

 » Après la pluie, c’est là qu’il faut aller voir Venise « 

L’eau cherche l’horizontalité,les chemins des piétons et de l’eau se trouvent.

Après la pluie, le fin film d’eau sur pierre transforme l’espace. L’espace est rempli par reflets et la ville en entier semble se transformer en liquide. Donc, le marbre mouillé, est d’eau. Grâce à l’eau, le sol semble se casser, disparaître, se dissoudre. La lumière capturée, elle pousse de sa surface, en faisant que les espaces se mélangent entre réalité et fiction.

À Venise les vides urbains ont soif, n’importe quel espace libre, même les plus petits, tous étaient destinés à collecter le fluide en citernes, pouvant garder en soi le maximum d’eaux de pluie. De cette manière, l’eau de pluie déterminait la forme et le développement de la ville. Les limites des puits publics coïncidaient avec le plan des futurs bâtiments. Dans les bâtiments privés une citerne était aussi construite, ce qui faisait que le patio intérieur était conçu comme un impluvium. Venise conserve ainsi l’eau verticale et l’amasse.

EAU HORIZONTALEclima-acqua-alta

Le bord,la limite,lecontour de l’eau, la manière dans laquelle l’eau et la terre se mettent en rapport.

La ville de Venise se mesure dans ses eux. L’eau de Venise est horizontale. Ses variantes transforment la vie des habitants. La ville vive au rythme des marées. Les cloches annoncent la montée de l’eau sur le solide. Il n’y existe pas une ville plus liée à la mer.

L’alternance des marées haute et basse deux fois par jour, son hauteur et tonalité de couleur varient avec les saisons. Le temps à Venise reste imprimé, physiquement visible sur ses bords de mer.

« Possiblement il n’y existe pas d’une autre ville qui se déploie aussi soumise à un même rythme » dit Georg Simmel

L’eau à Venise fraternise avec le son, inséparablement. L’eau se prolonge par sa sonorité, elle estompe ses limites.

La proximité de l’eau à Venise, à peine un mètre au dessous du solide, elle favorise l’angle de perception du reflet. Le ciel, depuis l’eau, nous salue en chaque canal.

La lumière qu’on aperçoit est réfléchie, mais pas que sur l’eau, sinon qu’aussi sur les sols en pierre.

À Venise on vérifie que l’eau, grâce à a lumière, modifie notre perception et la manière de comprendre les espaces. L’eau  va construire une nouvelle ville, une nouvelle dimension qui va nous enroule.

Venise est, certainement, un catalogue d’eaux.

Venise est une carte de sonorités d’eau, instrument en pierre que vole les sons au liquide.

Venise est d’eaux, la vie sur elle, un accord entre le liquide et l’homme.

 María R Rodríguez Escudero – rodriguezescuderomr@gmail.com