LES COUTUMES DES RAJATHANIS

 Premières impressions

A environ 200 kilomètres de la suffocante capitale New Delhi, on arrive au Rajasthan, une région située au Nord- Ouest de l’inde.

Parcourir cette région haute en couleurs, n’est pas de tout repos, et nous avions vite compris qu’il était compliqué d’organiser au préalable son séjour, dans la mesure où notre état d’esprit pouvait changer du jour au lendemain tant l’expérience allait être intense. Nous avions donc décidé de choisir chaque destination et le moyen de transport adéquat, au jour le jour. Nous nous laisserions ainsi guider par nos intuitions et les différentes rencontres que nous ferions. Les préjugés voleront d’ailleurs en éclat à mesure que nous découvrirons la région, et nous comprendrons rapidement que plusieurs voyages en Inde, ne suffiraient certainement pas à saisir les multiples coutumes et pratiques de la population.

Un peu d’histoire

La région du Rajasthan est culturellement intéressante dans le sens où elle a évolué avec les différentes périodes de domination. Cependant, son histoire reste surtout mêlée à celle des Rajputs et repose sur les mythes et les légendes de ces clans de guerriers qui dominèrent le Nord de l’Inde entre le X° et le XII° siècle.  Les Rajputs ‘ fils de rois’, créèrent de nouveaux états indépendants au VI ème siècle formant le Rajputana, l’actuel Rajasthan. Puis, survint la conquête musulmane qui, arrivée par vagues successive depuis le 8 ème siècle, gagnèrent sérieusement du terrain sur les Rasjputs vers le 15 ème siècle.  Les Mogols, musulmans venus d’Asie Centrale, finirent par bâtir un empire du même nom chassant les traditions des rois Rajputs.

Ainsi, de nombreux temples, sanctuaires, palais et forts situés dans les villes de la région, illustrent remarquablement l’histoire du Rajasthan et notamment celle de ces deux grandes dominations.

Le palais des vents (Hawa Mahal) à Jaipur; symbole de l’architecture Rajput

La religion

Il y a au Rajasthan 90 % d’hindous, un peu moins de 10% de musulmans et le reste de la population est sikhs ou jaïns. On ne peut pas parler de l’Inde sans évoquer l’importance de la religion et notamment de la religion hindouiste. En effet , la population est constituée d’une incroyable mosaïque de castes qui la subdivise en groupe d’importance selon des critères religieux et économiques, ‘légitimant’ certaines inégalités, et donnant une posture différente aux plus pauvre, qui ne pourront jamais accéder au rang plus élevé d’une caste.

De façon générale le Rajasthan étant de tradition très rurale, ces habitants vivent en étroite communion avec la nature et ont un grand respect des espèces vivantes quel qu’elles soient. Les singes, notamment, vivent dans la plus totale promiscuité avec les rajasthani. Quant aux vaches, il n’est pas rare d’en croiser dans les rues des villes de la région. Elles sont sacrées aux yeux des habitants et seraient nés, selon la tradition, en même temps que la caste supérieure des Brahman.

Les singes observent les touristes du haut d’un temple à Pushkar

Les vaches allongées en plein milieux de la route dans la capitale du Rajasthan, Jaipur

Une région haute en couleurs

Le Rajasthan est une région remarquable de part son architecture mais également et surtout de part ses habitants toujours souriants et chaleureux. Les femmes sont fières et resplendissent, drapées de leurs saris, dont les couleurs des parures des tissus et des bijoux s’allient parfaitement aux teintes pastels des bâtiments vieillis. Une atmosphère rayonnante se dégage de chacune des villes de la région, qui arriverait presque, non pas à cacher, l’extrême pauvreté d’une partie de la population mais à la rendre noble.

Les femmes en saris, dans une rue de Jaipur

 

JAISALMER, VILLE DU DESERT

jasalmer de loin

Vue de la forteresse de Jaisalmer depuis le désert du Thar

La cité 

A quelques kilomètres de Jaisalmer, la cité nous apparait déjà, comme un mirage à l’allure d’une montagne dorée. La ville se trouve au coeur du désert du Thar à l’ouest du Rajasthan, près de la frontière avec le Pakistan. Elle est d’ailleurs baptisée Sonar Kella, la forteresse d’or et elle conserve de nombreux témoignages des rajput, les rois hindous qui régnèrent sur le Rajasthan pendant près de deux cents ans. La cité est fondée en 1156 par le Maharaja Jaisal Singh qui fit construire autour une muraille de 5 km. Le chauffeur nous dépose d’ailleurs en bas des remparts car les voitures ne sont pas admise à l’intérieur même de la cité. Les rues sinueuses, pavées et parfois en très mauvais état ne le permettent pas.

Le tissu urbain 

La ville de Jaisalmer est une masse compacte constituée de milliers de ces maisons à patio imbriquées les unes avec les autres. Quelles soit petites ou grandes, simples ou complexes, elles appliquent le même principes d’organisation et de construction. Elles créent ainsi des rues étroites vous faisant passer d’une lumière intense et vive, révélant de multiples nuances de jaune, à une soudaine obscurité apaisante. Il est fréquent de rencontrer une vache au détour d’une route, qui oblige parfois le passant à marcher à son rythme jusqu’à la prochaine intersection.

Imbrications de maisons à l’intérieur de la cité de Jaisalmer

L’architecture des havelî 

On remarque tout de suite les maisons minutieusement sculptées, dentelées, ciselées dans la pierre de grès jaune. Les portes, balcons, fenêtres ajourées et piliers étaient à l’époque travaillés et ensuite incorporés aux bâtiments par les maçons. Jaisalmer fut donc l’une des premières cités dans le monde à utiliser des éléments préfabriqués. C’est dans une de ces demeures appelée Haveli, qui furent construites aux 17 ème siècle par de riches marchands, que nous séjournons. Une cours centrale, autour de laquelle les différentes chambres s’organisent, permet aux touristes de se détendre, sur des hamacs mis à leur disposition, profitant d’un apport de lumière naturelle et d’aération optimal. A l’époque, la cours pouvait accueillir les espaces de jeux pour les enfants mais aussi,le lieu du bain, de la lessive et servait parfois d’extension des usages des différentes pièces autour. De grandes et lourdes portes en bois ouvrent sur les chambres baignées dans la pénombre et décorées comme à l’époque des Maharaja; le lit sur une plateforme surélevée, recouvert d’une teinture colorée, des sculptures en ‘marbre’, des mosaïques et du mobilier doré. De retour dans la cours on emprunte un escalier qui nous emmène sur les toits; une large terrasse nous donne à voir l’étendue de la ville actuelle, là où tout se passe, et de constater que, quand les bâtiments qui constituent la ville intra-muros ne sont pas des restaurants ou des hôtels, il sont souvent inhabités et en ruines.

Les havelîs et leurs décors de pierre finement sculptés

Vue de la ville périphérique depuis le toît terrasse d’une havelî

L’autre Jaisalmer…

La cité de Jaisalmer est aujourd’hui une ville dédiée aux touristes. Comme évoqué plutôt, on peut dire que la plupart des magnifiques bâtiments qui la compose sont devenues des hôtels, des restaurants ou des offices qui vendent des séjours dans le désert. Il est extrêmement agréable de se balader et de se perdre dans ce labyrinthe, pourtant une fois qu’on a fait le tour plusieurs fois, qu’on a observé les différentes vues, certes magnifiques, que proposent les terrasses de restaurants et d’hôtels, on s’ennuie… Pour retrouver la vie et le brouhaha omniprésent du Rajasthan il faut sortir des remparts et se balader dans les rues animées, où se concentre l’activité. C’est ici qu’on se fait inviter pour un massage du cuir chevelu chez le barber, qu’on déguste les meilleurs beignets végétariens épicés – pour quelques roupies à peine-, qu’on est sujet à la curiosité amusée des habitants ou qu’on se laisse prendre aux jeux des interminables négociations avec les marchands. Bref c’est aussi ça Jaisalmer…

Une des rues animées et vivantes de ‘l’autre Jaisalmer’


PUSHKAR, VILLE SAINTE

Le lac Pushkar

Lieu de pélerinage 

On est immédiatement subjuguée par le spectacle que nous offre la ville de Pushkar, un des lieux les plus saint de l’hindouisme. Une légende dit que le Dieu Brahma tua ici un démon avec un pétale de fleur de lotus, puis le miracle accompli il jeta le pétale qui se transforma alors en lac sacré. C’est pourquoi, les temples qui lui sont dédiés sont nombreux à Pushkar. Il est en effet à l’origine de ce que les indiens appellent le tirtha, un terme qui désigne un lieu de pèlerinage majeur situé près d’un lac, d’un fleuve, d’une confluence ou de la mer. Tous les rajasthanis doivent accomplir au moins une fois dans leur vie ce pèlerinage en hommage à Brahma. Le temple de Brahma est situé dans la vielle ville et nous assistons à une cérémonie incroyable où chant et paroles divines se mélangent. Nous ne voulons pas s’attarder de peur de gêner, pourtant les indiens nous accueillent très chaleureusement et nous invitent à rester. C’est ici même, qu’on retrouvera émerveillés, Shobu, un petit indien, que ses parents nous avaient confiés le temps d’une photo, 4 jours auparavant, 150 kilomètre plus loin dans la ville de Jaipur, capitale du Rajasthan, une région peuplée de 40 millions d’habitant. Pas de doute, Pushkar est une ville sainte.

Le petit Shobu et sa famille retrouvées

Les Ghats

Pushkar s’élève au milieu du désert et s’est construite autour d’un lac du nom de la ville. 32 bassins d’eaux sacrées appelés Ghats, suivies d’emmarchements, s’organisent autour du lac , permettant aux visiteurs de s’adonner pleinement au rituel des ablutions. De nombreux pèlerins se livrent aux bains dans le but de recevoir le salut des dieux.

Les Ghats et la pratique des ablutions rituelles

C’est ainsi que homme et femmes organisés en groupes distincts se baignent, depuis les terrasses de gradins, dans ces bassins d’eaux sacrées, entièrement vêtus. En compagnie des singes nous observons timidement les eaux, reflétant les milles couleurs des saris des femmes.

femme sari pushkar

Les femmes réajustant leurs saris après le bain sacré

En fin de journée, la lumière rasante et d’une beauté invraisemblable semble plonger progressivement dans les eaux du lac. De nombreux touristes observent ébahis le spectacle, pendant que des petits indiens déambulent entre les différents groupes, en quête d’argent mais surtout d’exotisme.

Bibliographie:

Architectures en Inde ( Ecole nationale supérieure des Beaux- Arts de Paris )

Marie Ghiringhelli, marie-ghiringhelli@hotmail.fr