Jacques Herzog et Pierre de Meuron, nés en 1950 ont fondé le cabinet d’architecture éponyme au sortir de leurs études à l’Ecole polytechnique de Zurich. Basés à Bâle, ces deux architectes suisses connaissent aujourd’hui un succès mérité. L’agence employait 360 personnes en 2012 dans ses différentes succursales (Londres, Munich, Barcelone, San Francisco et Tokyo).

Bâle abrite certains des plus célèbres projets du cabinet d’architecture suisse. Depuis 1985, plus de 25 de leurs projets y ont pris place : logements, programme culturel, santé, et même des bâtiments plus techniques. Cette ville nous offre donc un bel échantillon d’étude du catalogue de compétences et de l’évolution de l’architecture de cette agence.

PRÉPARATION DU VOYAGE : RECHERCHE & CARTOGRAPHIE DES PROJETS

Afin de pouvoir visiter un maximum de bâtiments, un important travail de recherche préalable a été mené afin de recueillir quelques informations de base sur les projets bâlois d’Herzog et de Meuron. Ces recherches ont permis une cartographie assez complète de l’étendue des projets «accessibles» du cabinet suisse.

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CATALOGUE DE MATÉRIAUX 

Ce qui est frappant quand on observe tous ces projets, c’est la diversité matérielle dont il font preuve. Les architectes ont répondu à chaque fois de manière différente, n’arborant aucun «matériau fétiche» ou autre «mode structurel privilégié», ils ont tenté pour chaque projet de trouver la matérialité la plus adaptée au programme et à l’environnement. Ils confèrent ainsi une identité propre à chacun de leurs bâtiments. En voici quelques exemples :

CONSTANTES ARCHITECTURALES, DISPOSITIFS RÉCURRENTS

Bien qu’Herzog et de Meuron soient surtout connus pour expérimenter de nouvelles techniques à chaque projet, cette visite de Bâle a tout de même fait ressortir quelques points de similarité entre certains bâtiments du cabinet suisse.

Géométries simples
On retrouve dans de nombreux projets l’utilisation de formes géométriques simples. On a déjà parlé du motif de la «maison» (avec toit à double pente) dans un autre article à propos de la Vitrahaus. On peut aussi citer l’utilisation du cercle dans le percement du projet de la Messeplatz ou celle d’un parallélépipède très monolithique pour le Schaulager. Sur le toit du REHAB, Herzog et de Meuron ont dessiné des ouvertures zénithales en forme de sphère. Dans ce bâtiment on trouve également une piscine pour les patients, abritée sous un tétraèdre de béton. Leur très récent projet de logement situé sur Helsinkistrasse est également constitué d’une cube de béton surélevé dont les façades sont elles-même divisées en rectangles. La perspective redresse la forme de ces loggias et donne au piéton l’impression d’une façade carrée.

Architecture de la sous-face
Il y a un type de parcours qui semble particulièrement intéresser ces architectes : «passer dessous». En effet dans de nombreux projets on peut trouver des dispositifs de porte-à-faux ou de volumes surélevés qui permettent la mise en place des dispositifs d’entrée, de travailler le seuil et le passage.

Une fois encore, la Vitrahaus illustre cette remarque, l’entrée se fait depuis la cour centrale qui nécessite d’emprunter un «passage couvert» quelque soit le point d’accès. Le centre sportif Pfaffenholz est le témoin parfait de ce travail de l’entrée : les salles de sports à proprement parler sont situées dans un volume noir très rigide, alors que tous les espaces d’accueil sont dans un long élément de béton, présentant une impressionnante casquette en porte-à-faux. Très marqué, ce seuil constitue l’élément phare de ce projet.
Evidemment on peut aussi citer le New Hall, sur la Messeplatz, où les architectes ont réussi à mettre en place leur système à une bien plus grande échelle : c’est le bâtiment entier qui enjambe la place, toutes les circulations de la ville doivent donc «passer dessous», les piétons, les cyclistes et même le tramway !

Cette question du passage couvert entraîne une problématique assez difficile à traiter : celle du traitement de la sous-face. Dans le cas du centre sportif, les architectes ont décidé de retourner le matériau du sol sur le mur puis sur la sous-face. En revanche, dans le cas de la Vitrahaus ou de la Messeplatz, l’intention était plutôt de rattacher la sous-face aux façades afin d’affirmer au bâtiment son statut de volume détaché du sol, sous lequel il faut venir se glisser.

Détails et finitions
Enfin, même si on pourrait presque étendre cette remarque à toute l’architecture bâloise (voire à la Suisse entière ?), les bâtiments d’Herzog et de Meuron présentent tous un niveau de finition impressionnant. Le très bon entretien y est surement pour quelque chose, mais visiter un bâtiment juste livré ou un bâtiment vieux de dix ans procure exactement les même sensations de lisibilité des espaces et de contrôle total du projet.

En effet, on peut dire que si l’agence a un tel succès aujourd’hui c’est que l’attention portée aux détails qu’elle s’est imposée a su la démarquer. Bien sûr cette remarque est à rattacher à la question du budget. Plus le temps passe plus les projets de cette agence sont onéreux. Si au début de leur carrière, les architectes veillaient à produire ces effets pour un coût minimal, on ne peut pas dire que ce soit toujours le cas aujourd’hui.

Le petit immeuble réhabilité (Schützenmattstrasse) fut l’un des premiers projets de l’agence à Bâle, on peut y voir des systèmes de gestion de l’espace assez simples mais tout aussi efficaces. Par exemple, les façades présentent un dispositif de volets en accordéon qui assurent la privacité des logements tout en construisant la façade.

Au contraire si l’on observe l’un des derniers projets construits dans la région par le cabinet suisse, la Vitrahaus, on peut s’apercevoir que le projet n’a pas été pensé pour être «économique». Ce bâtiment époustouflant renvoie également une image de luxe. Bien que cela soit en accord avec les produits exposés, on aimerait pouvoir dire que la «bonne architecture» ne nécessite pas forcément de débourser des millions.

Bibliographie :

– El Croquis n° 152/153 : Herzog & de Meuron 2005-2010

– http://www.herzogdemeuron.com/index.html

Photographie de présentation : Messeplatz New Hall, Herzog & de Meuron

Auteur : Quentin Aubry – quentin.aubry@nantes.archi.fr

Voyage effectué du  07 Décembre au 12 Décembre 2014.