A Bâle, comme dans la plupart des grandes villes d’Europe, il est possible de repérer des éléments d’architecture remarquables (églises, anciens grands hôtels, ..) qui ont été conservés pour leur valeur patrimoniale. Par exemple le Roothus, ou Rathaus en allemand, qui date du XVe siècle et qui accueille aujourd’hui l’hôtel de ville ou encore la magnifique cathédrale (Basler Münster) bâtie à partir du XIIe siècle.

QUELLES SONT LES PARTICULARITÉS DE CETTE VILLE SUISSE ?

La neutralité perpétuelle de la Suisse a été déclarée pendant le congrès de Vienne, en 1815. Depuis, ce pays ne s’est pas engagé directement dans une guerre, évitant ainsi les destructions massives subies par la plupart des pays européens durant les deux guerres mondiales.

On peut donc trouver, en observant l’architecture d’une ville comme Bâle, un patchwork temporel assez impressionnant : certains anciens bâtiments existent toujours au sein de la ville, sans être des monuments ils côtoient parfois de très près des créations modernes ou contemporaines. Cette proximité parvient à mettre en valeur chacun des deux styles d’architecture.

SURÉLÉVATION, EXTENSION, DENT CREUSE :
RÉPONSES BÂLOISES

Dans la troisième ville de Suisse comme dans toute autre cité en progression économique, les architectes font face à la question du raccord à l’existant. Faut-il prolonger à l’identique ? Réinterpréter les caractéristiques du bâti voisin ? Affirmer un contraste total ? …

Ce sont les diverses réponses à ses problématiques d’extension/surélévation qui ont créé ce collage architectural dans les rue bâloises. Le contraste est la plupart du temps marqué entre l’extension et le projet existant, cependant il est possible de déceler quelques éléments de réflexion qui ont permis aux architectes d’harmoniser l’ensemble d’une construction (en jouant sur les couleurs, les proportions, ou encore les matériaux).

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Ces trois immeubles mitoyens sur le bord du Rhin illustrent par exemple cette affirmation d’un contraste total. Aucune similarité dans les formes, les matériaux ou les couleurs de ces trois bâtiments.

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Le cabinet d’architecture Diener & Diener a dessiné l’extension de la halle de marché de Bâle. Comme on peut le voir sur l’image (l’extension étant sur la gauche), le contraste a été affirmé par le choix de matériaux différents (des plaques de verre en façade installées devant un enduit anthracite). Même si formellement et matériellement, les deux étapes de construction s’opposent, les couleurs ont été choisies pour assurer une certaine uniformité, notamment en ce qui concerne les menuiseries.

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C’est aussi le cabinet Diener & Diener qui est à l’origine de cet immeuble couleur ocre situé au 1 Kohlenberg. L’immeuble gris était existant au moment de la construction. Cette fois, la couleur vient marquer le contraste l’immeuble qui l’encadre, et ce sont les formes et les proportions qui viennent répondre avec l’existant. Refusant les alignements directs, les menuiseries viennent tout de même appuyer le rythme très régulier de l’immeuble voisin.

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Un deuxième bâtiment a été conçu pour le Schauspiel Theater. On voit le contraste très fort entre ce bâtiment contemporain et la petite maison qui le jouxte et qui abrite aujourd’hui la billetterie du théâtre. Même si les matériaux et les volumes sont très différents, l’utilisation de l’ardoise a permis d’harmoniser l’ensemble.

PALIMPSESTE URBAIN : RACONTER L’HISTOIRE DE BÂLE

Ce patchwork architectural donne à chaque rue son caractère, comme une arythmie contrôlée.

L’ensemble apparaît assez uniforme (à gauche, un extrait de la façade donnant sur le Rhin) et la vue des pignons latéraux aveugles permet au piéton de distinguer la présence de rues transversales de manière intuitive (sur la photo de droite, on comprend qu’il y a une rue transversale devant l’immeuble jaune car sa façade se retourne).

Ce collage permet également au passant, qu’il soit bâlois ou visiteur, de faire état de l’Histoire de la ville. Pouvoir voir l’Histoire au gré de ses déplacements, permet à chacun de conserver une conscience à l’échelle urbaine de l’évolution architecturale de son environnement direct.

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Photographie par Honorine van den Broek

A droite, une architecture plus traditionnelle, avec des pans de bois et des volets à battants a pour voisine une architecture moderne, presque brutaliste en béton enduit avec des stores et des loggias. L’évolution des modes de vies, du logement, des menuiseries, des couleurs, … est mise en scène dans cette simple photographie.

Devant le théâtre Schauspielhaus dont on a déjà parlé, il y a une place qui illustre bien comment le passant peut être témoin de l’évolution architecturale de la ville. En effet aux différents angles du carrefour on peut trouver :

  •  Un théâtre datant de l’époque moderne (XXe), avec des fenêtres en bandeau et un façade en dent de scie
  • Un immeuble classique en pierre de taille, avec chaînages d’angles et modénatures ( surement début XIXe)
  • Des maisons d’habitations traditionnelles en structure bois et façades enduites (XVIe)
  • Un cinéma et un théâtre contemporains à la façade majoritairement vitrée (XXIe)

ARCHITECTURE D’HIER ET D’AUJOURD’HUI :
PLURI-COMPETENCE BÂLOISE

L’architecture suisse, et notamment celle de Bâle, est réputée pour son niveau de finition et son souci du détail. Une fois encore, c’est la proximité de tous ces bâtiments d’époques différentes qui permet de réellement mettre en lumière tous les savoirs-faire présents dans cette ville en terme de création architecturale, de réhabilitation ou de restauration …

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Ces trois petits immeubles par exemple mettent en lumière, à eux seuls, de nombreux principes et techniques de construction (dans le mise en oeuvre des matériaux par exemple : pans de bois, bardage métallique, parement de brique)

L’extension réalisée par Diener & Diener nous permet aussi d’apprécier la précision de mise en oeuvre du verre en façade ainsi que le détail très discret du raccord à l’existant.

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Photographie par Honorine van den Broek

Le Rathaus (en rouge) et son voisin mitoyen nous permettent d’observer à la fois les compétences de restauration des architectes du patrimoine opérant dans cette ville (remarquables notamment par le travail de restitution de la polychromie) et celles de mise en oeuvre du béton coffré (ou préfabriqué) par exemple.

Photographie de présentation : Elsässertor II, Herzog & de Meuron

Auteur : Quentin Aubry – quentin.aubry@nantes.archi.fr

Voyage effectué du  07 Décembre au 12 Décembre 2014.