Savez-vous où se trouve l’Uruguay, et saviez-vous que ce pays existe ? Non pas vraiment, peut être pas plus que moi avant que je ne m’intéresse à cette destination pour aller y passer un semestre d’études.
L’Uruguay est un petit pays coincé entre deux grandes puissances : l’Argentine et le Brésil. Il est resté longtemps opprimé et dans l’ombre de ses deux pays voisins, mais il a réussi à se faire une place en Amérique du Sud même s’il en est le plus petit pays (il est quatre fois plus petit que la France !). Pourquoi y aller me direz-vous ?

Sa capitale : Montevideo

C’est un pays plutôt « sûr » (les avis divergent), stable politiquement, où même la marijuana a été légalisée. Mais surtout l’Uruguay nous offre des expériences authentiques. En effet, lorsque l’on arrive à Montevideo, petite capitale avec seulement 1,38 millions d’habitants, on peut avoir du mal à comprendre ce qui en fait son charme. Il suffit d’y vivre et d’y passer seulement six petits mois pour comprendre ce pourquoi on en tombe amoureux. Bien sûr ce pays ne peut rivaliser avec ses voisins dont les paysages sont à couper le souffle tant ils sont différents du nord au sud. L’Uruguay se distingue par ses routes de terres, ses étendues de prairies avec leurs gauchos rassemblant le bétail à dos de cheval, ses palmeraies infinies, ses maisons coloniales, ses dunes à perte de vue le long de l’Atlantique, ses lions et loups de mer près des phares en bord de côte. C’est aussi le maté que les amis ou les familles se partagent devant un coucher de soleil, autour d’un asado ou bien même en salle de cours.

Il faut se laisser charmer par ce pays, et non pas lui demander qu’il se dévoile à nous. En temps qu’européen on a tendance à attendre d’une capitale qu’elle nous offre une multitude d’activités touristiques comme à Paris, Londres, Madrid ou encore Rome. On peut facilement visiter tous les points touristiques de Montevideo en deux jours. En six mois je n’ai même pas visité la moitié des musées de la ville tant elle propose une grande variété d’offres culturelles mais aussi parce que j’ai été trop occupée à vivre à l’Uruguayenne. C’était le mode de vie « tranquilo », comme ils disent.

Ainsi à Montevideo ce sont les ballades du dimanche le long de la Rambla, au bord du Rio de la Plata, à attendre les plus beaux couchers du soleil en mangeant des chichis remplis de dulce de leche. Mais ce sont aussi les parillas cuites à l’asado, au feu de bois pendant des heures, à dévorer avec les amis. La ville est cosmopolite, à l’architecture éclectique, animée, et s’étend sur 20 km. d’un bout à l’autre proposant de multiples visages allant du port industriel aux plages longées de palmiers. Elle se love autour d’une baie naturelle dans laquelle est placé son grand port international. Cette ville fut fondée en 1724 en tant que mur de défense pour protéger les Espagnols des attaques des Portugais, des flibustiers et des corsaires français et anglais. Les premiers habitants, venant de Buenos-Aires ou des Canaries, ont été séduits par la côte le long du Rio de la Plata, qu’ils célèbrent encore aujourd’hui, comme si c’était la mer. Toutes les rues des villes côtières donnent sur le fleuve ainsi que tous les regards des Uruguayens. La population de Montevideo s’est enrichie avec l’arrivée d’immigrés venant de tous les horizons (Européens ou Africains). Chaque uruguayen que j’ai pu rencontrer se vantait d’avoir des origines de France, d’Espagne, d’Allemagne… Car dire que l’on est française c’est s’attendre à un « Qué lindo ! » (c’est génial !). Toutes ces traditions mélangées ont permis de construire une ville éclectique avec de nombreux témoignages urbains et architecturaux européens. Lorsque l’on parcourt la ville on peut tomber sur des édifices néoclassiques, des constructions inspirées de Florence, d’autres aux origines plus alpines avec des airs de chalets ou encore des avenues aux allures haussmanniennes. Ce qui m’a plu c’est la taille humaine de cette capitale, facilement accessible d’un bout à l’autre, sans aucune urgence et fureur typiques aux grandes capitales (comme sa voisine Buenos Aires).

Ciudad Vieja (Quartier historique), Montevideo

Montevideo c’est aussi la Ciudad Vieja (nom du quartier historique) qui vit la semaine et qui est déserte le week-end. Ce quartier propose des immeubles art-déco et néoclassiques certains décrépits et d’autres laissés à l’abandon malgré leur beauté architecturale. Les artistes l’investissent en recouvrant les murs de graphes aux milles couleurs (pas autant qu’à Valparaiso au Chili). Il n’est pas habité par les populations les plus riches puisque les immeubles sont défraîchis, il n’est donc pas rare de voir les enfants jouer dans la rue, et les jeunes écouter du reggaeton. Les beaux quartiers se trouvent plutôt au sud-est, pas loin des centres commerciaux et des tours modernes en bord de mer. Malheureusement, comme toute capitale latina, des bidonvilles se sont implantés en son pourtour. L’urbanisme de la ville est, comme dans la majorité des villes latino-américaines, organisé selon un plan orthogonal où chaque rue débouche sur le Rio que ce soit à l’est ou au sud. J’ai été étonnée par ce principe urbain où les trottoirs de l’espace public appartiennent aux constructions qui sont situées derrière. Cela engendre un mauvais entretien des trottoirs, il n’est donc pas rare de se tordre la cheville si l’on ne regarde pas devant soi, ou de recevoir une aspersion d’eau lorsqu’il pleut si l’on marche sur un pavé non fixé.
En 1851, Montevideo délimite la ville nouvelle (ciudad nueva), par rapport à la vieille ville (ciudad vieja). L’administration s’interroge sur le besoin d’un plan global. Auguste Guidini, un italien, réalise en 1912, le Plan Régulateur avec Eugenio Barofio et l’ingénieur Gianelli. La construction en damier de la vieille ville a servi de base pour construire la ville nouvelle. En 1994, Mariano Arana, un architecte, est élu comme maire de la ville grâce à sa popularité nationale, à ses prises de position pour sauvegarder et mettre en valeur la vieille ville de Montevideo. En juin 1996, il définit les objectifs du Plan d’Aménagement du Territoire.

World Trade Center de Pocitos, Montevideo

Pour les plus pauvres ou pour les plus riches, le football a une place très importante, dans ce pays qui avait organisé en 1930 la première coupe du monde FIFA dans le stade du Centenario. Ce sport entretient encore les rêves et les attentes des Uruguayens. Ayant assisté à un match de sélection pour la coupe du monde 2018, j’ai pu observer ce dévouement des supporters pour leurs icônes reconnues mondialement. Les jours de match, les Uruguayens laissent la ville à l’arrêt jusqu’à la surprise du score final. Il en est de même pour le carnaval, en plein milieu de l’été (janvier-février pour l’hémisphère sud), devenu une vraie institution de la capitale avec danseurs et danseuses qui ravivent les vieilles rues. Montevideo est une ville culturelle, où se déroulent des spectacles et événements chaque jour. C’est également une ville ouverte sur le monde, présentant des centres culturels étrangers mais aussi les bureaux administratifs du Mercosur. Les Uruguayens sont très « famille », et se retrouvent très souvent entre eux pour un asado ou même pour le sport le long de la Rambla. En tant qu’étranger, rares sont les fois où nous sommes invités chez eux.

Port de Buceo, Montevideo

Ses villes côtières : du Rio à l’Atlantique

L’Uruguay et ses villes côtières (base cartographie : http://www.fanrto.com/topics/mapa-mundi-con-nombre.html)

Les villes côtières Uruguayennes sont très différentes du Sud au Nord, de l’estuaire à l’océan. Je vous propose de découvrir la pittoresque Colonia del Sacramento qui se trouve au cœur de l’estuaire du Rio de la Plata, la station balnéaire Piriapolis du début du XXe siècle, l’extravagante Punta del Este où il faut y avoir été vu, José Ignacio et ses maisons contemporaines, La Paloma et La Pedrera qui sont les spots des amateurs de surf, l’isolée et décalée Cabo Polonio, et enfin Punta del Diablo décontractée et réputée pour ses plages festives et dunes à perte de vue.

Colonia del Sacramento, la pittoresque

Ruelle Colonia del Sacramento / Colonia del Sacramento

Cette cité paisible est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Cette ancienne colonie possède quelques rues pavées au sein des remparts et borde le Rio de la Plata. Elle a été conçue par les Portugais au XVIIIe siècle, qui avaient deviné que son emplacement était stratégique pour construire une cité au bord du Rio, au bord des terres espagnoles. En 1683 les espagnols délogèrent les portugais, et ainsi de suite à tour de rôle. Malgré ça la ville profita du commerce avec Buenos Aires qui est juste en face. Ce n’est qu’au début du XIXe siècle que la ville devint Uruguayenne ave

c l’indépendance de l’Uruguay. Elle est toujours une porte d’entrée de l’Uruguay puisque c’est aussi ici qu’arrivent les bateaux de Buenos Aires. Cette petite ville a su garder son charme pittoresque par ses maisons colorées et de style colonial, mais elle se développe aussi le long des plages par la construction de petits immeubles pour les Argentins en vacances.

Piriapolis, station balnéaire du début du XXe siècle

Plage et Rambla, Piriapolis / Hôtel Colon, Piriapolis

Cette station balnéaire est prisée par les Argentins et doit son nom à son fondateur Francisco Piria. Son nom d’origine était El Balneario del Porvenir (le balnéaire du futur). Don Piria acheta en 1890 un bout de terre qui renferme trois collines. La construction de sa résidence privée, le château de Piria par l’architecte Monzani, se termine en 1897. En 1905, il y fait construire le second édifice, l’Hôtel de Piriapolis. C’est ainsi qu’est construite la Rambla de los Argentinos en 1910 et deux ans après Piria vend les premiers immeubles. En 1913, Piria fait relier son château, en haut de la colline, au port par un téléphérique.

Punta del Este, extravagante reine de la Jet Set

Playa Brava, Punta del Este / Le port, Punta del Este

Punta del Este marque la frontière entre le Rio de la Plata et l’Océan Altantique. Elle est le lieu de vacances des riches familles argentines et brésiliennes. À l’origine, Punta del Est n’était qu’un lieu d’escale pour la réparation des navires par exemple. Dans les années 1502-1514, les européens découvrent cette « pointe de l’Est ». Ensuite ses côtes furent moins fréquentées à cause des Corsaires qui s’y cachaient. La péninsule resta de dunes et de sable jusqu’en 1820, à l’arrivée de Francisco Aguilar qui fit venir des chameaux d’Orient pour la transformer. Le phare est construit en 1860 et le quai en 1890 pour l’arrivée des marchandises et des visiteurs. Les premiers hôtels se construisent dans les années 1910 et le chemin de fer arrive dans la ville en 1930, il n’existe plus actuellement. En 1939, la ville est témoin de l’une des plus importante batailles maritimes de la Seconde Guerre mondiale. La ville attire dès les années 1940 la classe aisée de l’Argentine qui y investit. Comme à Montevideo, une 2×2 voies sépare la plage et la rambla de la ville. L’ambiance de cette ville est plutôt bling bling, huppée, et jugée incontournable. Cependant les plus fortunés s’en vont plutôt chercher le calme de la Barra, Garzon ou José Ignacio. De nombreux immeubles des années 1960, malheureusement inspirés des immeubles européens, vieillissent assez mal. On voit encore aujourd’hui de nombreuses tours se construire face à la mer, toujours plus hautes, plus modernes et plus originales les unes des autres. Même le président américain est en train de se faire construire une tour à son effigie. C’est à partir de Punta del Este que la population et les touristes commencent à se baigner car l’eau du Rio est marron. Au passage l’une des attractions de la ville est de donner les restes de poissons aux lions de mer apprivoisés du Port.

José Ignacio, riche et contemporaine

La plage, José Ignacio / Le port, José Ignacio

Elle porte le nom du premier colon de la région, qui fût envoyé au XVIIIe siècle pour apporter des produits du pays en Espagne. Il s’installa sur cette péninsule pour y devenir pêcheur et y créa un village et une communauté. Elle est aujourd’hui la station balnéaire des classes supérieures. Elle a conservé un caractère pittoresque de par sa place, son phare, ses côtes sauvages et son petit port de pêche. Les vacanciers fortunés, viennent y trouver de la tranquillité et profitent de l’été dans leurs grandes résidences secondaires contemporaines. Elles sont à l’image des villas européennes, affichant de nouvelles formes architecturales et de nouvelles matérialités.

La Paloma et La Pedrera, spots des amateurs de surf et des baleines

Vue de la ville depuis le phare, La Paloma / La plage, La Paloma

La plage, La Pedrera / Les rues, La Pedrera

Ce sont deux petites stations balnéaires, bordées de longues plages de sable fin. La Paloma bénéficie d’une vie locale, même en dehors de la période touristique. La route principale est bordée de constructions des années 1950-70 dont certaines sont à l’abandon, et se termine sur un skate-parc qui sert de rond-point, recouvert de graphes et considéré comme un monument. De nombreuses routes sont toujours de terre ou de sable. Cette petite ville propose des aménagements côtiers pour observer les baleines qui migrent vers le Sud. « C’est surtout à La Pedrera que l’on peut en voir entre juillet et fin octobre », m’a expliqué la Femme des Baleines, qui vient tous les jours les observer lorsqu’elles viennent se frotter le long des rochers. Ce village est mieux conservé que La Paloma et est construit dans les pins. J’ai pu dormir dans l’une de ces cabanes faites mains par les habitants de ces villages. Chacune d’elle est singulière par ses matériaux utilisés et son agencement. L’ambiance architecturale qui y règne est très particulière mais très agréable.

Cabo Polonio, isolée et décalée

Vue du village depuis le phare, Cabo Polonio / Les rues, Cabo Polonio

Ce cap s’appelle Polonio car c’est le nom du capitaine d’un bateau qui y fit naufrage en 1753. Les premiers habitants arrivent au début au XXe siècle, vivent de la pêche et de manière rustique à cause des dunes qui les séparent des voies de transport. Encore aujourd’hui, il n’y a aucun véhicule à part des jeeps qui font la navette entre le village et le parking. C’est un petit village de maisons (ranchos) colorées constituées de planches de bois et de bien d’autres matériaux réutilisés. Urbanistiquement, dirons nous il n’y a pas de limite parcellaire entre les cabanes. Ce village a réussi à garder son authenticité et est devenu depuis les années 1970 le repère touristique des « hippies-bohémiens ». Il n’y a pas d’eau courante mais des grands bidons approvisionnés en eau. Il n’y a pas non plus l’électricité, seulement quelques habitations ou commerces alimentés par des générateurs ou panneaux solaires locaux. L’un des attraits : les colonies de lions et loups de mer qui prennent le soleil au pied du phare. Les dunes des alentours bougent constamment à cause du vent.

Punta del Diablo, la décontractée aux dunes infinissables

Les dunes, Punta del Diablo (photo d’Elisa Ragon) / Le village, Punta del Diablo (source: https://theculturetrip.com)

Ce village est tout récent (années 1960), et a été créé par des pêcheurs de requins qui ont occupé les lieux illégalement. Le village s’étend le long des dunes préservées qui s’étendent à perte de vue.
On imagine peu ces villages, surtout ce dernier, sur la côte française car ils seraient vite bétonnés et envahis de constructions. Leur challenge est de réussir à garder ces côtes telles qu’elles sont encore actuellement, en évitant la propagation de nouvelles constructions le long du littoral.
Déjà les argentins achètent de grandes étendues de terres le long des côtés, qu’en sera-t-il dans 10 ans ?

Laura Quinton
Voyage du 04/08/17 au 13/02/18

Photographies de l’auteur (sauf mention contraire)

Bibliographie

García Lescano Miguel et Chouy Jorge, Costas y faros del Uruguay, 2008, Aguaclara
Lonely Planet Argentine et Uruguay, 2017
Petit Futé Uruguay, 2017
Wöhrl Ann-Christine, Montevideo, 2003, Le Passage Eds